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Page:Revue des Deux Mondes - 1906 - tome 33.djvu/556

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entre l’homme et la terre ; mais beaucoup d’alimens sont aisément transportables ; ils peuvent être mis à la disposition de l’homme très loin de leur point d’origine ; les habitans de l’Europe occidentale consomment en grande quanti le café, thé et cacao, tandis que le lait des vaches de nos montagnes européennes va nourrir des habitans de Shangaï ou du Cap. À vrai dire, tels et tels groupes humains, et surtout les « primitifs, » les Naturvölker, ont une nourriture ordinaire qui correspond à une plus simple et à une plus expressive géographie de l’alimentation. Il n’en est pas moins vrai que les transports multipliés, améliorés, facilités, tendent à mêler de plus en plus tout ce que consomment les hommes.

L’habitation n’a pas besoin d’être quotidiennement renouvelée ; mais elle est fixe, elle occupe un point précis de l’espace ; elle a ce double avantage au point de vue géographique d’être un fait souvent considérable qui utilise en général des ressources naturelles toutes proches, et d’être un fait qui dure sur un emplacement déterminé. L’habitation qui est mobile, la tente du nomade, participe de la facilité de transport qui caractérise le vêtement ; et géographiquement, c’est une sorte de vêtement.

Phénomène localisé et fixe, l’habitation est par excellence un phénomène géographique. De tous les phénomènes qui se rattachent à la satisfaction des nécessités essentielles de la vie humaine, c’est celui-là qui possède au plus haut degré une signification géographique, et nous nous rappellerons tout à l’heure qu’à ce titre il doit être l’objet d’une très spéciale observation. Dans la hiérarchie géographique des faits humains, une place exceptionnelle revient à l’habitation.


Nous avons — et à dessein — parlé jusqu’ici des faits matériels qui répondent à la satisfaction des exigences premières de la vie humaine, sans examiner les moyens et les modalités, par lesquels les hommes subviennent à la satisfaction de ces exigences. Or ils ne se contentent ni toujours, ni partout de ramasser pour se nourrir des fruits sauvages (simple cueillette), ils ne se contentent ni toujours ni partout de tuer des animaux qu’ils n’ont pas élevés (chasse et pêche), mais ils songent et ils s’essaient et ils s’appliquent à s’assurer par avance et pour l’avenir des produits végétaux, animaux ou minéraux. Obéissant toujours à l’impérieuse domination