depuis les mestres-de-camp jusqu’aux enseignes, à 1.400 et 1.700 fr. par an, furent inférieures aux nôtres et à celles du moyen âge.
Est-ce parce que la concurrence avait disparu du marché des hommes d’armes, depuis qu’un unique acheteur subsistait : le roi ? En effet, de tous les monopoles qu’il exerce de nos jours, le plus ancien que l’État se soit réservé est celui des levées militaires. Aux temps modernes, la réduction générale des salaires explique le bas prix des soldats. La baisse des traitemens d’officiers tint à d’autres causes : on trouve aujourd’hui pour rien des maires de chefs-lieux et des juges aux tribunaux de commerce ; fonctions aussi absorbantes que celles de percepteur ou d’agent-voyer. On ne trouverait pourtant pas des agens-voyers ni des percepteurs gratuits.
Lorsque les « hasards de la guerre » furent de moins en moins, de bons hasards, lorsque la profession des armes cessa d’être lucrative pour devenir onéreuse, elle demeura brillante et la plus honorée dans l’opinion. Dès lors la bourgeoisie aisée se fit « d’épée » aussi bien que « de robe » et se piqua d’émulation pour disputer aux anciennes races ce monopole du courage, qui seul passait pour faire des gentilshommes authentiques. Ainsi les grades furent aimés pour eux-mêmes et ambitionnés pour l’honneur, bien que de peu de profit.
Nous n’avons rien aujourd’hui à mettre en regard des anciennes charges de cour ; et nous ne pouvons non plus rapprocher celles des Capétiens ou des Valois, qui se donnaient, de celles des Bourbons, qui se vendaient. Ici les émolumens furent en partie l’intérêt du capital. De même pour les emplois de justice ou de finance. Parmi les mieux rétribués des légistes ou des comptables on remarque un chancelier de Bretagne, sous les derniers ducs : 23.000 fr. ; le clerc des requêtes de l’hôtel du roi sous Charles V : 19.500 fr. ; un clerc et conseiller du comte de Provence : 13.700 fr. ; tous personnages privilégiés. Le plus souvent ces civils, qui administrent et gouvernent effectivement le fief ou le royaume, ont de 6.000 à 10.000 fr. ; toujours inférieurs aux chambellans, écuyers, maîtres d’hôtel et échansons attachés à la personne du roi ou du duc.