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Ainsi, malgré des conditions exceptionnellement favorables, qui ne se rencontrent nulle part au même degré, l’Allemagne prévoit que les sous-officiers pourraient lui manquer, comme nombre, alors que déjà les qualités désirables leur font défaut.

Ses nombreuses écoles de sous-officiers constituent certainement, dans l’état actuel des méthodes employées dans tous les pays, un avantage des plus appréciables sur ceux qui en sont dépourvus ; mais l’insuffisance des sujets qu’elles forment au point de vue de la qualité, d’après le document cité, révèle une lacune, qui se trouve d’ailleurs dans toutes les armées. Elle tient à des causes autres que celles qui lui sont attribuées par l’auteur allemand.

Nous chercherons au cours de cette étude à faire connaître ces causes, en indiquant les moyens propres à la faire disparaître dans notre pays et à nous assurer, par leur emploi, une supériorité indéniable.

La force de l’armée allemande réside plus particulièrement dans son corps d’officiers. Les mœurs, des traditions anciennes entretenues avec soin, poussent l’élite de la nation à briguer l’honneur d’en faire partie et ont permis de réaliser la parité d’origine fondée sur une instruction générale étendue et une éducation solide. Le grand nombre de candidats et la sélection qui en résulte ont développé, à un haut degré, l’émulation et le travail et donnent aux cadres des officiers allemands une composition remarquable et une valeur des plus sérieuses. Néanmoins les critiques formulées au sujet des sous-officiers ne passent pas au-dessus de leurs têtes. Ils en sont les éducateurs, et si, malgré leur zèle, leurs soins et le nombre des sujets, leur tâche reste incomplète, c’est qu’il y a, entre eux, une défectuosité commune, indépendante des milieux sociaux d’où ils sont sortis, comme de la différence de leur instruction.

La France se trouve par suite de la pénurie d’institutions, militaires similaires et de la différence de ses mœurs, de ses tendances et de son système économique et politique, dans des conditions moins favorables que l’Allemagne pour le recrutement de ses cadres. Elle ne dispose, pour former les sous-officiers, que des quelques années qu’ils doivent passer sous les drapeaux. De là la résistance opposée à toutes les mesures qui tendent à diminuer la durée du service, de là le l’établissement et l’augmentation successive des rengagemens avec primes, malgré toutes les bonnes raisons qui les avaient fait écarter de la loi du 27 juillet 1872.