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Pour les mieux doués, l’expérience s’élargira de l’action de l’homme à celle du groupe et visera la conduite de fractions de troupes, escouades, sections, pelotons et même compagnies pour les plus aptes. Ceux qui joindront à la clairvoyance et à la promptitude du jugement les qualités physiques nécessaires, — vigueur, agilité, et adresse encore fortifiées par des sentimens patriotiques élevés, seront tout désignés pour la formation des cadres. Des dispositions législatives pourront leur faciliter et leur abréger l’admission aux grades, après leur incorporation. Dans le même ordre d’idées, il devra être fait une large place à ces élémens dans les programmes des concours d’admission aux écoles militaires.

L’application de pareils procédés assurera une base solide aux vocations, en les rendant conscientes de leurs devoirs, de leurs obligations, de la nature des travaux à accomplir et de leur avenir. Ils influeront très favorablement sur la discipline, dont le fondement le plus solide est dans la confiance de ceux qui obéissent en la valeur de ceux qui commandent. Même dans les pays monarchiques et aristocratiques où le prestige du prince et de la hiérarchie sociale imprègne les esprits, sous la pression des événemens, celui-ci ne se maintient que par la conviction d’une supériorité réelle.

A plus forte raison, dans une démocratie où les sentimens d’égalité prédominent, — pour que ne se produisent pas à la longue en temps de paix, brusquement à la guerre, la désagrégation des forces, parle relâchement ou la rupture des liens qui les unissent et les font agir avec le même élan vers le but commun, — il faut pouvoir compter sur la constitution et la solidité de cadres dont les élémens auront donné, dès le jeune âge, presque dès l’école, les preuves d’une incontestable supériorité, indéniable pour les témoins de son éclosion et de ses manifestations successives. La sélection des grades élevés s’exerçant dans les corps et dans toutes les situations militaires, dans des conditions semblables, fera éclater le mérite à tous les yeux et l’imposera aux choix. Le commandement se trouvera ainsi entre les mains des plus dignes et des plus capables et, ce qui est fort important, de chefs reconnus comme tels, de bas en haut, comme de haut en bas. Quelles assises autrement solides qu’une autorité imposée et souvent discutée, aux heures difficiles, sinon ouvertement, du moins au fond des âmes, exposée à la merci d’un