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dans cet affichage communal, au discours du ministre des Finances les discours, empreints d’un juste esprit critique, de plusieurs députés ou sénateurs notables, M. Jules Roche, M. Prévet, M. Boudenoot et quelques autres, ou plutôt, il serait beaucoup plus simple de renoncer à ce procédé assez enfantin de l’affichage qui ne soumet au public qu’une thèse, parfois une thèse tout à fait momentanée, et que peu de temps après l’auteur même doit abandonner. C’est ce qui est arrivé dans le cas qui nous occupe. Le budget de 1907, que M. Poincaré a déposé devant la Chambre nouvelle à la fin du mois de juin dernier, et le très ample exposé des motifs qui le précède constituent bien, quoi qu’on dise, une sorte d’antithèse au discours affiché deux mois auparavant. Il laisse une impression aussi préoccupante que le premier en produisait une rassurante, tellement « la manière » est pour beaucoup dans la présentation des choses et dans l’effet qu’elles font sur les esprits.


I

Le budget de 1907, proposé par M. Poincaré, a fait une sensation profonde. Les cercles parlementaires et le public s’en sont immédiatement émus. Chacun savait que le grossissement continu de nos dépenses devait nous mener rapidement à une accumulation effrayante de charges ; nous-même, l’hiver dernier, nous avions donné ce titre à un article sur le budget de 1906 ; « La course au quatrième milliard. » Nous en étions encore séparés par près de 300 millions. Or, M. Poincaré nous place, pour l’année 1907 même, en face d’un budget qui dépasse quatre milliards, exactement 4 010 922 535 francs. Quand on croyait avoir encore trois ou quatre étapes à franchir avant d’arriver à ce sommet vertigineux, M. Poincaré nous montre que nous y sommes parvenus inconsciemment en une seule étape : et, cependant, les principales grosses dépenses projetées, celle notamment des retraites ouvrières, n’ont aucune place dans ce budget.

On comprend que cette révélation ait provoqué d’abord de la stupeur, puis chez quelques-uns de l’opposition, sinon de l’indignation.

Pour bien comprendre ce qu’a de saisissant et d’effrayant ce budget de plus de 4 milliards de francs, il faut se rappeler qu’il se produit après que, en 1900, l’on a détaché du budget de la