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jamais exigée du contribuable et qu’elle n’interviendra jamais ; que facultativement de la part de celui-ci et dans son intérêt propre. En Angleterre, il n’y a aucune déclaration du revenu global, sauf de la part de ceux qui soutiennent qu’ils n’ont qu’un revenu inférieur au minimum imposable ou bien que leur revenu, tout en dépassant le minimum imposable, rentre dans la catégorie des revenus modiques auxquels on accorde certaines réductions. Mais en Angleterre la déclaration est obligatoire pour les revenus de la cédule D, à savoir les revenus des industriels, des commerçans, des professionnels, avocats, médecins, architectes, hommes de lettres, artistes, etc., tous ceux qui ont des émolumens, des honoraires et non des traitemens fixes. M. Poincaré prétend qu’il n’exigera pas de déclaration de ces catégories de personnes ; alors, il les imposera d’après l’importance de leur logement, et l’on ne voit pas, dans ce cas, pourquoi il substituerait cet impôt à notre contribution mobilière : ou bien il les taxera d’après la commune renommée, ce qui est le comble de l’arbitraire. En fait, il est certain que l’on aboutira pour les revenus professionnels consistant en bénéfices variables à la déclaration obligatoire, car il ne peut y avoir aucune autre base sérieuse d’imposition, puisque, en rejetant la contribution mobilière, on supprime l’indice du loyer d’habitation.

M. Poincaré affirme que son impôt ne sera que modérément progressif ou plutôt dégressif : comme la généralité de ceux qui emploient ces expressions, il croit qu’elles sont synonymes et que la seconde n’est qu’une formule adoucie de la première. Il y a, au contraire, comme nous l’avons démontré ailleurs, une différence essentielle, capitale, entre l’impôt progressif et l’impôt dégressif : l’impôt est dégressif quand le taux maximum de l’impôt s’applique à la majorité de la matière imposable et que des réductions du taux de l’impôt ne sont accordées qu’à la minorité de la matière imposable. L’impôt est, au contraire, progressif quand le taux maximum ne porte que sur la minorité de la matière imposable. Les droits successoraux sont progressifs ; notre contribution mobilière, anciennement du moins, était dégressive. Cette définition, qui répond à la nature des choses, est de la plus haute importance, à la fois théorique et pratique[1].

L’exposé qu’a fait de son système M. Poincaré dans la séance

  1. Voyez notre Traité de la Science des Finances, 7e édition, t. I, p. 203 et 204 ; on y trouve des exemples à l’appui.