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et la même différence existe entre les propriétaires de valeurs mobilières quelconques de ce côté-ci et de l’autre côté de la Manche. Il y a certainement bien près d’une demi-douzaine de millions de personnes en France qui possèdent des valeurs mobilières. Quand celles-ci vont être assujetties, en plus des impôts actuels, à l’impôt général sur le revenu, on commencera par retenir le montant de cet impôt, quitte à le restituer ensuite aux personnes qui feront la preuve qu’elles n’ont pas un revenu suffisant. Voilà donc 5 à 6 millions de personnes auxquelles on va retenir une fraction du revenu de leurs titres, en leur demandant, pour la leur rendre, des justifications diverses. Conçoit-on quels tracas pour ce grand nombre de porteurs, quelle paperasserie, quelle augmentation du chiffre d’employés ?

Les titres au porteur supportent déjà deux impôts : l’impôt actuel de 4 pour 100 sur le revenu et l’impôt de transmission perçu par abonnement, qui va actuellement à 6 pour 100 environ, et que l’on propose de porter à 7 et demi. On y joindra un troisième impôt de 3 pour 100, semble-t-il, dit impôt général sur le revenu, ce sera en tout 14 et demi pour 100. Aucun autre impôt direct ne sera, d’ailleurs, complètement supprimé, car on maintiendra, pour l’assiette des taxes locales, la contribution mobilière et la contribution des portes et fenêtres.

Quand l’impôt général sur le revenu sera appliqué, ce sera une déception profonde chez ses partisans aujourd’hui aveugles et une irritation universelle chez les millions d’assujettis, dont les uns seront des assujettis permanens et les autres des assujettis provisoires, puisqu’on commencera par leur faire une retenue, quitte à la leur restituer plus tard après des démarches et des justifications. Ceux qui auront la responsabilité de cet impôt, sauf quelques fanatiques, regretteront et rougiront d’avoir voté une taxe à la fois antipathique à notre tempérament national et en opposition avec la distribution, le morcellement, l’émiettement de la richesse en France


VI

Nous avons résumé, d’après les documens officiels récens, l’histoire de trente ans de finances publiques, dans notre pays Elle est très peu édifiante : un gaspillage constant, changeant seulement de forme et d’objet ; deux budgets seulement en équilibre