Page:Revue des Deux Mondes - 1906 - tome 34.djvu/903

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Qu’advient-il de la fortune, du temporel de l’Eglise désétablie ? Eglises et cathédrales, avec tout leur contenu mobilier, lui sont laissées gratuitement ; les presbytères, à très bas prix[1]. Tout le reste, terres et dîmes, passe aux mains d’une Commission de liquidation chargée d’en réaliser la valeur[2]. La loi, notons-le, réserve et indemnise tous les droits acquis, ceux mêmes des landlords propriétaires de bénéfices, ceux des maîtres d’écoles, chantres, bedeaux, et jusqu’à ceux des fossoyeurs des cimetières : le surplus du Church Fund devra servir d’abord à compenser par une dotation en capital la suppression des crédits annuels en faveur des presbytériens et du collège de Maynooth, et, pour le reste, à satisfaire éventuellement à des besoins d’intérêt public en Irlande.

De tous les droits acquis, les plus importans sont naturellement les droits viagers des membres du clergé : la valeur capitalisée au taux des tables de mortalité et augmentée d’une prime supplémentaire de 12 pour 100, don gracieux de l’Etat, en est versée entre les mains de l’Eglise désétablie qui reçoit de ce chef, pour les 2 043 ministres du culte alors en fonctions[3], un capital de 7 581 075 livres sterling, sur lequel elle a réalisé, toutes compensations payées aux ayans droit, grâce à la prime supplémentaire du Trésor, à une heureuse gestion financière, à un système de transactions pour retraites anticipées, grâce enfin à l’importance même du chiffre des droits acquis, un bénéfice

  1. Le sol des presbytères, jardins et dépendances, est vendu à l’église désétablie moyennant dix fois le montant du revenu annuel imposable de ces propriétés. Quant aux maisons, elles sont données pour rien quand il n’y a pas de building charge (charge de construction à payer par l’État), et là où il y a building charge, pour un prix que Gladstone qualifiait de nominal. (Voyez Hansard, vol. CXCIV, p. 442, vol. CXCV, p. 1630. Cf. le Discours de Gladstone à la Chambre des communes du 26 juillet 1870. Cf. la très intéressante étude du Rev. Dr J. F. Hogan dans le Freeman’s Journal du 17 novembre 1904.)
  2. La Church Temporalities Commission, dont les opérations furent reprises à partir de 1881 par la Land Commission. Les terres sont vendues peu à peu ; les dîmes sont capitalisées et un « système de rachat de ces dîmes par les landlords est organisé au moyen d’avances faites par l’Échiquier, avances remboursables en 45 ans. — Voyez, sur les finances du Désétablissement le Report of the Commissioners of Church temporalities in Ireland for the period 1869-1880 (Dublin, 1880).
  3. Le nombre exact des ministres du culte alors en fonctions était de 2 282, mais un petit nombre furent traités à part, ayant demandé à profiter d’une disposition de la loi qui leur permettrait de refuser la « capitalisation » de leurs droits viagers et de se faire servir ces droits annuellement par l’Etat jusqu’à leur décès.