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incriminé par Mme  Sidgwick… Dans l’obscurité, les moyens de fraude sont inimaginables. J’ai vu un jeune médium qui avait réussi à dissimuler un bâton et simulait avec lui des coups frappés au plafond. J’en ai connu deux autres qui donnaient des coups de poing sur la table, d’autres la frappaient par-dessous avec le pied. Tout est possible dans les ténèbres et avec certains observateurs confians. »


Clairvoyance. — Si je mets la clairvoyance ici dans les phénomènes dont la démonstration scientifique me paraît, sinon prochaine, du moins possible, c’est que je n’attache à ce mot aucune idée de divination ou de prophétie. J’en fais uniquement la faculté de voir à travers les corps opaques. J’élimine donc de cette étude les sujets que, dans le public, on appelle des voyantes.

Si la clairvoyance est jamais prouvée, le sujet qui en sera doué pourra peut-être révéler dans l’estomac un corps étranger (à la façon des rayons Rœntgen) ; s’il connaît bien son anatomie normale, il pourra se rendre compte qu’un foie est augmenté de volume ou qu’il y a du liquide dans une plèvre. Mais il n’aura pas le pouvoir de diagnostiquer une maladie qu’il ne connaît pas et encore moins d’en indiquer le remède, pas plus qu’il ne pourra découvrir un trésor ou prédire l’avenir.

Ce n’est donc pas sans étonnement que, dans le monde scientifique, on a vu se dérouler récemment certains épisodes du procès de la voyante de Saint-Quentin.

Une hystérique hypnotisable était mise en contact avec les malades, diagnostiquait leur maladie et indiquait le remède. Poursuivie pour exercice illégal de la médecine, elle demande une expertise médicale. Très sagement, le docteur Paul Magnin, désigné par le juge d’instruction, conclut que « l’état d’hypnotisme, même le plus développé, ne confère à ceux qui y sont plongés aucune faculté extraordinaire, aucune aptitude spéciale. » Désigné par l’avocat pour faire une contre-expertise, le docteur Baraduc procède à des expériences, aussi peu concluantes que peu scientifiques, dans lesquelles il fait deviner à la voyante le caractère, la maladie ou le sexe d’un individu par le contact de cheveux, d’un mouchoir ou d’un gilet et conclut qu’« elle est un instrument vivant psychométrique, dont la loi doit reconnaître la véracité, si elle croit en devoir limiter l’emploi. » Adoptant