Page:Revue des Deux Mondes - 1906 - tome 36.djvu/683

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cesse amélioré de tout cet organisme, aux multiples rouages, qu’il créa dans plusieurs de ses parties, qu’il perfectionna dans toutes les autres, que Le Tellier prépara le succès des réformes, sur quelques-unes desquelles il nous reste à jeter un rapide coup d’œil.


IV

L’une des plus importantes qui, après celle de la discipline, base de toute organisation militaire sérieuse, devait forcément et constamment préoccuper Le Tellier, comme plus tard ses successeurs, fut celle du recrutement même de l’année, tant pour la quantité que pour la qualité des soldats, sans cesse réclamés plus nombreux, pour les grandes guerres qui précédèrent et suivirent les traités de Westphalie et des Pyrénées. Pour y pourvoir, on avait alors recours à trois modes de procéder, également défectueux dans leur principe et surtout dans leurs résultats : la levée, l’engagement de soldats étrangers mercenaires, l’enrôlement.

La levée proprement dite n’était ordonnée que dans les circonstances où, le royaume paraissant en péril, on avait eu, à l’époque antérieure, recours à l’appel du ban et de l’arrière-ban. Au XVIIe siècle, la plus célèbre levée eut lieu après cette fameuse prise de Corbie, qui jeta l’alarme dans la France entière, et il ne serait pas difficile d’y trouver plus d’un trait commun avec le départ des volontaires de 1792, après que la patrie eut été proclamée en danger. L’ennemi ayant envoyé îles partis jusqu’aux portes de Paris, les sept corps de métiers allèrent trouver le Roi revenu en hâte de Saint-Germain « et lui firent offre, dit Richelieu dans ses Mémoires, de leurs personnes et de leurs biens avec une si grande gaieté et affection que la plupart d’eux lui embrassoient et baisoient les mains ; ensuite ils dressèrent un rôle du nombre d’hommes que chacun d’eux pourroit lever et soudoyer et le mirent entre les mains du lieutenant civil, comme aussi le rôle et les noms des hommes d’entre eux propres à porter les armes, afin que le Roi s’en servit selon qu’il en auroit besoin. La même ordonnance fut envoyée à tous les collèges, communautés, fabriques, monastères rentes, à laquelle tous obéirent avec un grand zèle ; de sorte qu’en moins de dix jours (à Paris seulement) le Roi eut de quoi lever et entretenir, trois