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c’est surtout le chiffre des effets de commerce résultant du crédit qu’il importe de régler, et cela d’après le montant du numéraire possédé par les banques. Quand il y a beaucoup d’or et d’argent comparativement aux effets de commerce en circulation, le crédit doit être encouragé par l’abaissement du taux de l’escompte ; au contraire, c’est en sachant relever le taux de celui-ci rapidement et sans hésitations au moindre signe d’excès spéculatifs, que l’on peut prévenir les crises ou, en tous cas, en diminuer les funestes conséquences. La Banque d’Angleterre le comprend très bien maintenant et l’on doit admirer la promptitude et l’énergie avec lesquelles elle procède dans ce sens. Les anciennes banques d’Amsterdam et de Hambourg avaient été les premières à entrer dans cette voie et à renoncer à la limitation proportionnelle des billets de banque ; la nouvelle Banque d’Allemagne a bien compris la grosse erreur de l’acte de Robert Peel qui a pour effet le plus certain de prolonger les crises une fois qu’elles sont écloses et surtout d’en augmenter l’intensité. Aussi, loin de diminuer le chiffre de la circulation en temps de crise l’Allemagne l’augmente-t-elle, mais en imposant à l’excédent une taxe qui oblige tout naturellement la Banque à élever le taux de son escompte pour rétablir l’équilibre. En résumé, la vérité est que c’est uniquement à l’abus du crédit qu’il faut attribuer les crises et non pas au montant de la circulation des billets de banque, ni à la proportionnalité de ceux-ci avec les encaisses, ni en général aux bilans des banques. Ces bilans enregistrent les effets et non pas les causes des exagérations, mais, ainsi que nous le verrons plus loin, leurs indications sont précieuses, elles sont en réalité le thermomètre de l’état des affaires.

On a cru longtemps que les crises étaient dues principalement aux mauvaises récoltes. Il est certain que, dans ces circonstances, il faut recourir aux pays étrangers, payer en or ou en quelque chose d’équivalent les envois qu’ils nous font, recourir plus ou moins au crédit. Si ce moment-là coïncide avec la trop grande expansion des affaires en général, une mauvaise récolte fait éclater la mine trop chargée ; c’est ce qui a eu lieu par exemple en 1846 et 1847 ; si au contraire les importations de céréales ont lieu dans la période de reprise des affaires, comme le cas s’est présenté en 1879 et 1880, où la France a dû demander en deux ans à l’étranger plus de 1 200 millions de subsistances, il n’en résulte aucun embarras grave. Une récolte déficitaire