Page:Revue des Deux Mondes - 1906 - tome 36.djvu/845

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’agiotage. Autrefois, on connaissait peu les valeurs de Bourse et l’on spéculait de préférence sur les marchandises, malgré les frais relativement considérables qu’il fallait subir ; aujourd’hui l’agiotage sur les valeurs de Bourse n’est grevé que de charges minimes et permet de compter sur les grandes fluctuations chères à la spéculation.

La question des prix nous met sur la voie des causes, nous pourrions presque dire de la cause des crises. La grande loi économique de l’offre et de la demande nous montre que la hausse des prix provient de l’expansion des transactions qui, à son tour, donne lieu à un accroissement des effets de commerce. Leur négociation plus importante élève le portefeuille commercial des banques en même temps que celles-ci donnent en échange une plus grande quantité de billets et de numéraire, d’où pour les Banques d’émission augmentation de leur portefeuille commercial et diminution de leur encaisse. L’écart entre ces deux compartimens de banques devient d’autant plus fort que la spéculation exagère le prix des choses et augmente le recours au crédit ; l’étude des crises passées nous montre que le krach arrive toujours au moment où l’écart entre le portefeuille commercial et l’encaisse est le plus considérable. Nous voilà sur la piste du baromètre des crises ; nous allons en saisir aisément le mécanisme en recourant à la méthode moderne si commode du tableau graphique, du diagramme.

Traçons sur une feuille de papier une série de colonnes verticales représentant la succession des années, depuis 1847 par exemple jusqu’à nos jours. Teintons de grosses hachures noires les années de krach, et de hachures légères les années où commence la reprise des affaires et de la prospérité. Sur les lignes horizontales, graduons les millions en débutant par un zéro sur la ligne la plus basse pour arriver, de cent en cent millions, jusqu’à 3 milliards. Dessinons maintenant, au moyen d’une ligue grasse les chiffres du portefeuille commercial de la Banque de France, en négligeant, bien entendu, les oscillations journalières, nous obtiendrons ce qu’on appelle la courbe du portefeuille. Opérons de même pour l’encaisse or, mais en employant un trait léger, notre tableau sera complet. Le tableau que nous obtiendrons ainsi nous montre que la colonne des krachs correspond toujours à l’époque de l’élévation la plus grande du portefeuille et en même temps de l’encaisse la plus basse. La colonne de