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au parti grossdeutsch, par le maintien du programme grossdeutsch, il empêche la réforme, sans d’ailleurs aucune perspective de réaliser ses propres désirs. Il travaille pour la stagnation, et par là pour la révolution, tandis que, sous un empereur prussien, il ne perdra rien, et ne fera qu’obtenir une plus grande liberté pour l’Église. Il est entre les mains de ce parti, de décider si la réforme de la Confédération germanique se fera par des voies pacifiques ou par les voies de la révolution ; s’il s’associe à l’idée du Nationalverein, les gouvernemens sont forcés de céder. Par là, un élément conservateur s’introduira dans le mouvement, et ce sera une garantie que le mouvement restera un mouvement de réforme.


Très préoccupé de ces pensées, Hohenlohe en entretint Montalembert, pour que le grand orateur agît sur les catholiques rhénans ses amis ; il ne parvint pas à le convaincre. La thèse était curieuse sur les lèvres de Hohenlohe, qui devait peu de temps après travailler à Munich pour la Prusse. On s’inquiétait, ce semble, entre libéraux de bonne compagnie, d’un certain radicalisme qui faisait des progrès dans le parti de la « Petite Allemagne. » Ce parti manquait d’une droite : c’était gênant pour la Prusse, et c’était effrayant pour les petits États sur lesquels il aurait pu avoir prise, et qui dès lors devenaient plus rétifs à la propagande. Hohenlohe rêvait d’une « Petite Allemagne » dans laquelle le parti catholique ferait équilibre au Nationalverein ; il dressait l’épouvantail de la révolution, le spectre des menaces dont elle inquiétait le pouvoir, et espérait ainsi réconcilier au programme de Radowitz les catholiques, soucieux, en principe, de consolider le pouvoir jusque dans ses assises, le pouvoir qui vient de Dieu.

Mais précisément, — et c’est là ce qui affaiblissait la thèse de Hohenlohe, — les catholiques prétendaient, par leur résistance même à l’idée d’une « Petite Allemagne, » représenter la cause de la légitimité : den deutschen Legitimismus, disait-on volontiers ; et cela voulait dire : l’attachement aux droits traditionnels de l’Empereur, aux prérogatives traditionnelles de la Diète, au statut territorial qu’avaient créé les traités de 1815. Parce que les Français, ennemis nés de l’Allemagne, avaient fait une lézarde dans l’édifice construit par ces traités, fallait-il couronner les succès de la force en désertant la cause du vieux droit ? Sur les lèvres de Mallinckrodt ou d’Auguste Reichensperger, ce mot de droit prenait une incomparable majesté : et très rares encore étaient les catholiques allemands qui n’étaient pas des légitimistes. Au congrès catholique de Prague en 1860, au