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me fit connaître que c’était le signe manifeste de son alliance avec lui et qu’en partageant ses tourmens, je devenais l’épouse du Dieu crucifié. Quand je revins à mon état ordinaire, je m’aperçus que ma tête était tout enflée ; de plus, les violentes douleurs que j’y ressentais m’ôtaient les forces à tel point que je pouvais à peine me tenir debout. »

Les médecins qui entreprirent de guérir Véronique de son stigmate et de ses souffrances sur l’ordre de l’évêque Eustachi, purent en constater la réalité en même temps |que leur impuissance, et la sœur Florida Céoli, chargée par ses supérieurs d’examiner les marques de la couronne, affirma plus tard sous serment : « J’ai vu au-dessus du front, tantôt un cercle rouge, tantôt de petits boutons de la grosseur d’une tête d’épingle qui faisaient le tour de sa tête[1]. » Ce cercle et ces boutons persistèrent jusqu’à la mort de Véronique, c’est-à-dire l’espace de trente-cinq ans.

Trois ans plus tard, le jour de Noël, elle reçoit le stigmate du côté, image de la plaie de Jésus sous la protection de laquelle elle a vécu. « Jésus enfant m’apparut, » dit-elle, « tout brillant de gloire, m’appelant son épouse et s’offrant à remplir tous mes désirs. Je lui répondis donc en lui donnant le doux nom d’époux : Je ne veux, je ne désire que vous, et tout ce que je vous demande, par vos mérites et ceux de votre Bienheureuse Mère, c’est la conversion des pécheurs…

« En disant cela, je m’aperçus que le saint enfant tenait une baguette d’or en haut de laquelle était une flamme et dont la partie inférieure était faite d’une petite lance de feu. Il mit la baguette sur son cœur et la pointe de la lance dans le mien qui, au même instant, fut traversé de part en part… Revenue à moi, je sentis une vive douleur au cœur et, ayant mis un linge à cet endroit, je le retirai plein de sang[2]. »

Avant de la quitter, Jésus lui avait annoncé qu’elle recevrait les stigmates de ses cinq plaies le Vendredi Saint de l’année suivante, qui devait tomber le 5 avril ; elle les reçut en effet à la date fixée et elle rapporte tout au long, dans son Journal, la scène de sa stigmatisation. Elle eut d’abord plusieurs ravisse-mens successifs au cours desquels elle vit son ange confesser devant Jésus tous les péchés qu’elle avait commis ; pénétrée de

  1. Journal, ibid., p. 124.
  2. Id., ibid., p. 156.