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dans la paume des mains qu’à la partie supérieure ; la plaie du côté était longue de cinq doigts et large d’un doigt au milieu ; elle était toujours rouge et ouverte ; le sang en sortait souvent[1]. »

Avec saint François d’Assise et Véronique Giuliani, on pourrait citer plusieurs cas de stigmatisation complète, également garantis par des témoins dignes de foi, celui de Catherine de Raconisio par exemple, de Catherine de Ricci[2], de Jeanne de Jésus-Marie[3]et quelques autres auxquelles nous ne nous ferons pas faute d’emprunter les détails qui nous paraîtront particulièrement intéressans. Mais il nous suffira des deux cas précédens pour appuyer l’ensemble de nos critiques et de nos explications.


II

Et d’abord, nous avons à peine besoin de dire quel sens symbolique et profond tous les mystiques stigmatisés attachent au fait même de leur stigmatisation.

Porter les marques de la croix, de la couronne d’épines, de la lance et des clous, c’est être jugé digne par Jésus de compatir à ses souffrances ; c’est, suivant les propres paroles d’un historien du mysticisme, « gravir avec lui le Calvaire du crucifiement, avant de monter avec lui le Thabor de la Transfiguration[4]. » Aussi tous les mystiques souffrent-ils, dans leurs stigmates, des douleurs violentes qu’ils tiennent pour la partie essentielle de leur stigmatisation, et sans lesquelles leurs stigmates visibles ne seraient à leurs yeux qu’un vain décor. Ils éprouvent sous la croix, sous la couronne, sous les clous, sous la lance, les mêmes souffrances que Jésus ; ils râlent et meurent vraiment avec lui ; ils participent à sa Passion de toute la puissance de leurs nerfs. Nous avons vu François et Véronique souffrir dans leurs extases toutes les douleurs du crucifiement ; ainsi font-ils tous : Catherine de Raconisio éprouvait de violentes douleurs sous la couronne de sang qu’elle laissa voir à Jean-François de la

  1. Journal, ibid., p. 165.
  2. 1522-1589.
  3. 1584-1630.
  4. Görres, op. cit., t. II, p. 189.