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corps. Un jour, l’un de ces expérimentateurs trace son nom avec un stylet mousse sur les deux bras du patient et lui dit : « Ce soir, à quatre heures, tu t’endormiras et tu saigneras au bras sur les lignes que je viens de tracer. Le soir, sur le côté paralysé rien ne se produit, mais, sur le côté sain, on voit les caractères se détacher en relief et en rouge sur la pâleur de la peau, et des gouttelettes de sang perler en plusieurs points. »

Plus tard, en 1886, le docteur Mabille voit le même sujet, dans des attaques spontanées d’hystérie, se donner à haute voix l’ordre de saigner au bras et présenter, quelque temps après, les mêmes hémorragies[1].

MM. Binet et Feré, qui rapportent plusieurs cas de ce genre dans leur ouvrage sur le Magnétisme animal, ajoutent qu’à la Salpêtrière, M. Charcot a produit fréquemment, chez des hypnotisés, des brûlures par suggestion, et l’on pourrait citer d’autres faits analogues. On en peut conclure que, si la suggestion est toute-puissante chez les hystériques dans l’ordre musculaire, si elle peut déterminer des paralysies ou des contractures, elle est loin d’être impuissante dans les phénomènes intimes de la nutrition, de la circulation, de la sécrétion, et qu’elle peut non seulement provoquer ces lésions de la peau auxquelles les névropathes sont naturellement sujets, mais encore les localiser à, tel endroit précis du corps que l’expérimentateur a désigné. Or, si la suggestion agit de la sorte sur les phénomènes de la vie végétative, l’explication des stigmates, telle que M. Maury l’a donnée, a beaucoup de chances d’être la bonne, et nous pouvons la reprendre en la précisant.


IV

Un fait, dont il ignorait l’importance et qui cependant est capital, c’est que tous les stigmatisés sont des extatiques et que tous ont reçu, au cours d’une extase, les stigmates dont ils sont marqués.

Est-ce à dire qu’ils furent tous hystériques ? Beaucoup de neurologistes n’auraient pas hésité, il y a vingt ans, devant cette conclusion, parce qu’ils assimilaient volontiers l’hystérie et le

  1. Cf. Binet et Feré, le Magnétisme animal, p. 147.