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épiées, mille intrigues m’enveloppent ; je fuis ce milieu énervant, et avec d’autant plus de raison que je tiens à ne traiter cette affaire qu’avec Votre Majesté, et à tout cacher, jusqu’à ce que le coup éclate. Je vous remercie, Sire, des sentimens que vous avez la bonté de m’exprimer, et je vous prie de croire que je vous suis sincèrement et affectueusement dévoué (6 novembre). »


IX

Je repartis pour Saint-Tropez le 8 novembre. Le 11, je reçus la lettre suivante de l’Empereur : « Compiègne, 9 novembre. — Mon cher monsieur Emile Ollivier, je vous remercie de votre lettre du 6, et j’adopte toutes les observations qu’elle contient, car elles partent d’un cœur droit et d’un esprit élevé. Le moment de l’avènement du nouveau ministère devrait être le 25 novembre, environ, mais d’ici là, il faut que vous me signaliez les hommes qu’il faudrait introduire dans le cabinet. J’ai pensé à une personne qui serait très bien placée au Commerce s’il voulait accepter un ministère, c’est M. Napoléon Daru. Forcade consentirait à aller au Conseil d’État, parce que là il embrasserait toutes les questions et que ce changement ne ressemblerait pas à un désaveu de sa conduite ; mais alors que faire de Chasseloup-Laubat ? Les questions de personnes sont les plus difficiles et souvent entravent les meilleurs projets. Tâchez donc de me proposer une combinaison qui puisse s’exécuter promptement en ayant d’avance le consentement des candidats sans ébruiter la combinaison. Je sais que je vous propose presque la solution de la quadrature du cercle, mais je ne crois rien d’impossible à votre courage et à votre sagacité. Croyez à mes sentimens d’estime et d’amitié. — NAPOLEON. » Cette lettre atténuait encore les dissentimens. Ma politique sur la presse était acceptée, Forcade quittait l’Intérieur, et, allant au-devant de mes demandes, l’Empereur m’offrait lui-même un nom de nature à faciliter ma tâche, du côté de mes amis, celui de Napoléon Daru.

Je répondis aussitôt : « Sire, je suis bien heureux qu’un accord complet existe entre nous. Je me range à l’avis de Votre Majesté, sur la date de la constitution du ministère et sur le