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décisive. Maintes fois, quand il était chancelier de l’Echiquier, il fit de la réduction de l’Income tax le trait marquant de ses budgets (the chief feature of his budgets), parce qu’il était convaincu que c’était une taxe des plus inégales dans son incidence (most unfair in its incidence) ; dans les années qui suivirent 1850 et de nouveau celles qui suivirent 1870, il fit des plans sérieux pour sa suppression. Avec notre système fiscal tendu à l’extrême et nos dépenses qui se gonflent annuellement, les millions que procure l’Income tax sont devenus une nécessité vitale pour le Trésor. L’impôt anormal est devenu normal avec le temps. Les gens en sont venus à accepter l’Income tax, comme une nécessité désagréable, de même que les infirmes se résignent à une maladie chronique. Mais si elles acceptent la taxe, elles n’acceptent pas la prétention que le taux doit en être de 5 pour 100 (a shilling in the pound) et qu’une réduction est impossible parce qu’il y a d’autres contribuables plus dignes d’intérêt. Le contribuable à l’Income tax paie aussi les taxes indirectes ; il supporte pratiquement le fardeau entier des droits de succession ; si les droits de douane ou de contributions indirectes sont élevés, il en paie su part ; que, par surcroit, on lui demande 5 pour 100 de son revenu intégral, qu’on le taxe sur ses économies, cela est injuste… Le maintien de l’Income tax au taux de 5 pour 100, dans une année de prospérité sans précédent (comme le prouvent les statistiques du Board of Trade) est un encouragement direct aux aspirations socialistes (is a direct encouragement to the socialistic aspirations)… ; le taux de 5 pour 100 est un outrage au citoyen et un danger pour l’État (an outrage to the citizen and a danger to the State). » Ainsi parle le Daily Telegraph[1] ; cependant l’Income tax que supportent les Anglais est infiniment plus doux et comme taux et comme moyen d’investigation que le projet français d’impôt personnel sur le revenu ; celui-ci irait, on l’a vu, jusqu’à 13 et 15 pour 100 d’après M. Caillaux, jusqu’à 17 ou 19 pour 100 d’après la Commission des Réformes fiscales sur

  1. Pour apaiser les protestations contre l’Income tax, le chancelier de l’Échiquier, M. Asquith, dans son projet de budget de 1907-1908, propose de réduire à 9 pence par livre sterling (90 centimes pour 25 francs), soit au taux de 3 fr. 60 p. 100 environ, l’impôt sur les revenus strictement personnels (produits du travail, des professions, de l’industrie et du commerce) quand le revenu total sera inférieur à 2 000 livres sterling ou 50 000 francs. Pour les autres cas, la taxe restera de 1 shilling par livre sterling ou 5 p. 100 : on calcule que sur 1100 000 contribuables environ, 913 000 bénéficieront de la détaxe.