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deux puissances n’envisagent pas favorablement notre proposition tendant à ce qu’elles envoient leurs attachés militaires accompagner les forces turques. Nous maintenons cette proposition, qui a reçu l’appui conditionnel du gouvernement italien, et nous proposons que chacune des puissances délègue, mettons, six officiers, dans ce but, afin d’exercer une action restrictive sur les troupes turques et d’obtenir des informations dignes de foi. »

Pour apprécier toute l’importance de ce document, il suffit d’en faire remarquer l’accent impérieux, hautain, et d’en confronter le texte avec celui des « décisions arrêtées à Mürzsteg, » et transmises sous forme d’instructions identiques aux ambassadeurs des deux puissances à Constantinople. Le programme austro-russe de Mürzsteg est, en réalité, un programme anglais ; il a été visiblement rédigé sous l’inspiration directe de la note de lord Lansdowne, dont il adopte les vues générales. Il est nécessaire, puisqu’il régit encore actuellement la politique européenne en Macédoine, d’en résumer les articles :


1° Nommer auprès d’Hilmi Pacha des agens civils spéciaux d’Autriche-Hongrie et de Russie obligés d’accompagner partout l’Inspecteur général, d’attirer son attention sur les besoins de la population chrétienne, de lui signaler les abus des autorités locales, de transmettre les recommandations y relatives des ambassadeurs à Constantinople et d’informer leurs gouvernemens de tout ce qui se passe dans le pays. Comme aides auxdits agens pourraient être nommés des secrétaires et des drogmans chargés de l’exécution de leurs ordres et autorisés à cet effet à des tournées dans les districts pour questionner les habitans des villages chrétiens, surveiller les autorités locales, etc. Le mandat des agens civils expirera dans le délai de deux ans.

2° Confier la lâche de réorganiser la gendarmerie à un général européen « au service du gouvernement ottoman, » et à des officiers qui se partageraient les circonscriptions, « où ils déploieraient leur activité de contrôleurs, d’instructeurs et d’organisateurs, » et surveilleraient aussi les procédés des troupes envers la population.

3° Aussitôt qu’un apaisement du pays sera constaté, demander au gouvernement ottoman une modification dans les délimitations territoriales, les unités administratives, en vue d’un groupement plus régulier des différentes nationalités.

4° Réorganisation des institutions administratives et judiciaires avec accès ouvert aux chrétiens ; développement des autonomies locales.

5° Instituer dans les principaux centres des commissions composées, pour parties égales, de chrétiens et de musulmans « pour l’examen des crimes politiques et autres commis pendant les troubles ; » les consuls des deux puissances y prendraient part.