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REVUE MUSICALE


THEATRE DU CHATELET : Salomé, drame musical en un acte ; poème d’Oscar Wilde, musique de M. Richard Strauss. — THEATRE DE L’OPERA-COMIQUE : Ariane et Barbe-Bleue, conte musical en trois actes ; poème de M. Maurice Mæterlinck, musique de M. Paul Dukas.


L’impression que le spectacle de Salomé nous a faite ne fut point inégale à l’effet que nous en avait produit la lecture. Un mot suffira pour la résumer : c’est une impression de scandale.

La nuit, sur les terrasses de Machéro, ou Makaur, « forteresse colossale, bâtie par Alexandre Jannée, puis relevée par Hérode, dans un des ouadis les plus abrupts, à l’Orient de la mer Morte[1]. » A l’intérieur du palais, Hérode, avec sa femme et belle-sœur Hérodiade et Salomé sa belle-fille, célèbre par un festin l’anniversaire de sa naissance. Au dehors, des officiers et des gardes causent ensemble. Un d’entre eux, jeune chef syrien, Narraboth, aime la princesse. Il ne la vit jamais plus belle que ce soir, et plus étrangement pâle. Par momens, une voix rude se fait entendre. Elle semble sortir des entrailles de la terre. Elle sort en effet d’une citerne, où l’on retient prisonnier, sur l’ordre du tétrarque, celui que nous avons coutume d’appeler Jean-Baptiste, le Jaokanann de Flaubert dans Hérodias, qu’Oscar Wilde a nommé Jochanaan.

Soudain Salomé paraît. Elle a fui la chaleur du banquet et surtout « les regards de taupe » que lui jetait son tétrarque de beau-père. Elle aspire avec délices la fraîcheur et la pureté de la nuit. Cependant, la voix fatidique monte encore de l’abîme. Elle menace et promet tour à tour, prêchant la pénitence, annonçant le Sauveur. Interdite, la fille

  1. Renan, Vie de Jésus.