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nettement contraire à la proposition britannique. On y estimait, comme à Saint-Pétersbourg, qu’un débat sur la limitation des armemens serait sans fruit et risquerait de n’être pas sans danger. Il obtint toutefois l’assurance, ultérieurement confirmée, que, si le gouvernement impérial était décidé à ne pas prendre part à ce débat, il ne ferait pas du retrait du projet anglais la condition de sa présence à La Haye. A Londres, M. de Martens constata que l’idée de sir Henry Campbell Bannerman n’avait pas, dans son pays même, de très nombreux partisans, mais qu’en revanche il y tenait lui-même obstinément et n’admettait point qu’on l’écartât. Quelques semaines plus tard, le premier ministre allait d’ailleurs, dans un article publié par la revue The Nation[1], exposer de nouveau sa thèse, l’appuyer sur le précédent de 1899, sans se rendre compte qu’il fournissait ainsi contre cette thèse le plus fort des argumens, et déclarer enfin que les objections de ses contradicteurs n’avaient « aucun fondement. » Il ajoutait : « Nous n’irons pas les mains vides à La Haye. » Il se référait, non seulement au budget 1906-1907, mais à l’exercice suivant que M. Robertson, presque au même moment, caractérisait en déclarant qu’il offrait, par rapport à celui de 1903, une réduction réelle de 200 millions. A Paris, M. de Martens rencontra la meilleure volonté d’aider la Russie à sortir d’embarras, le désir aussi de ne pas se séparer de l’Angleterre et d’appuyer le principe de sa proposition, sans la croire d’ailleurs susceptible de succès. A Vienne, le baron d’Ærenthal se ralliait à l’opinion du prince de Bülow. A Madrid, le gouvernement royal s’associait à l’initiative de l’Angleterre et des Etats-Unis. A Rome, M. Tittoni, qui avait commencé par se montrer favorable à cette initiative, cherchait, avec une ingéniosité devant laquelle on ne peut que s’incliner, à concilier les contraires et préparait une circulaire transactionnelle dont nous aurons plus loin à marquer le caractère. La situation était donc loin d’être claire. Elle permettait du moins d’espérer que la réunion même de la conférence ne serait pas impossible. Pour M. de Martens, interprète fidèle de son gouvernement, c’était là l’essentiel ; et c’est ce qu’il exprimait en termes discrets, lorsqu’il disait : « Nous n’avons pas parlé et nous ne parlerons pas de la limitation des armemens parce que nous pensons que ce

  1. Dans son numéro du 1er mars.