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les mesures de préservation pour lesquelles on avait escompté le concours des initiatives et des capitaux ont été loin de répondre aux espérances.

Les subventions pour travaux facultatifs n’avaient atteint, en 1900, que 4 millions et demi, s’appliquant à 78 000 hectares : aussi fallut-il classer, en quatre ans, 30 078 hectares[1]de plus dans les périmètres, et combien encore y devraient être compris ! La dénudation du sol, que les communes ne pensent guère à prévenir par des travaux facultatifs dont une partie serait à leur charge, devient vite complète ; les travaux deviennent obligatoires et la dépense qu’ils entraînent, souvent décuplée, incombe alors entièrement à l’Etat, avec l’acquisition des terrains et le versement de leur prix dans les caisses municipales.

Dans les périmètres de restauration classés, la dévastation étale toute son horreur ; à chaque orage, des quartiers de rochers et des tranches de terrain se détachent de la montagne pour se précipiter vers les vallées, entraînées par des trombes d’eau qui portent l’inondation dans la plaine.

La partie de la zone montagneuse non classée dans les périmètres, à laquelle s’appliquent les mesures de préservation, est moins effrayante au premier aspect, mais infiniment plus inquiétante quand on y porte son attention. C’est là que le danger grandit toujours, que les bois fondent sous la dent du bétail, que les pelouses se transforment en rochers dénudés, que la surcharge du pâturage, la vaine pâture, la transhumance accomplissent leur destruction ; qu’il se forme sans cesse de nouveaux torrens et que les avalanches menacent maintenant une multitude de villages autrefois indemnes tandis que, presque partout, quelques francs dépensés à temps préviendraient une dégradation que des centaines de francs seront impuissans à réparer.

Dans les périmètres, le mal est déjà produit ; dans le reste des montagnes il s’accrut rapidement. Si dans un incendie il est plus pressé d’arrêter la marche du feu que de rebâtir les immeubles détruits, de même dans la montagne il faut apporter plus de hâte encore à enrayer la dégradation qu’à réparer des ruines depuis longtemps connues de tous les lecteurs de la Revue[2].

On a cherché à donner une impulsion nouvelle aux travaux

  1. La superficie du périmètre s’est élevée de 315 062 hectares en 1900, à 345 140 hectares en 1904.
  2. Clavé, le Reboisement des Alpes, dans la Revue du 1er février 1881.