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responsabilité ; ils affirmaient ignorer l’existence, à Athènes, de comités panhelléniques qui auraient encouragé les bandes à molester les roumanisans ; quant à ces bandes elles-mêmes, ils niaient avoir sur elles une autorité quelconque, ils les proclamaient macédoniennes et autonomes ; ils alléguaient enfin l’indépendance absolue du patriarcat. Etrange négociation où toute la discussion route sur des incidens qui se passent sur le territoire d’une tierce puissance et où chaque partie dissimule ses véritables griefs !

N’obtenant rien par la voie diplomatique, les Roumains cherchèrent des otages et s’en prirent aux Grecs qui sont nombreux dans certaines villes de Roumanie et qui exercent un commerce florissant. Chaque attentat, en Macédoine, fut immédiatement suivi d’arrêtés d’expulsion pris contre des sujets grecs. Des foules furieuses parcoururent les rues de Bucarest en protestant contre les massacres de Macédoine et en criant vengeance ; dans un de ces meetings, des Roumains lacérèrent et traînèrent dans la boue quelques lambeaux d’étoile représentant un drapeau hellénique. Cet incident décida une rupture que, depuis longtemps, en Grèce comme en Roumanie, la colère publique réclamait à grands cris. Le gouvernement du roi Carol chercha à atteindre son adversaire dans ses intérêts en dénonçant son traité de commerce. Les Grecs de Roumanie ruinés, molestés de toutes les façons, se mirent à émigrer, abandonnant leurs affaires. La Roumanie qui, au temps des hospodars, était gouvernée par des Grecs des grandes familles phanariotes, qui admirait et aimait la civilisation hellénique, est maintenant devenue ardemment antihellène.

Quant à la Grèce, elle a perdu une clientèle commerciale précieuse sans rien gagner en Macédoine ; elle se fait illusion si elle croit arrêter par des violences un mouvement national ; même s’il était factice, comme elle le soutient, c’est précisément en le persécutant qu’elle finirait par lui donner une réalité. M. Théotokis, dans son discours du 20 décembre 1900, a pris une attitude d’intransigeance et de fière résistance aux conseils de modération et de paix que les ministres des Affaires étrangères des grandes puissances lui avaient amicalement donnés. « Le gouvernement hellénique, a-t-il dit non sans quelque raideur, n’a fait aucune démarche et n’a pris aucune initiative en vue d’une entente avec la Roumanie ; » et il a ajouté qu’il refusait