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Paris, 24 janvier 1855.

Monsieur,

M. Brénier m’a remis la lettre que vous avez eu la bonté de lui adresser pour moi. Elle m’a touché par plus d’un côté et je vous en remercie bien vivement. Si je ne vous ai pas dit plus tôt le voyage de Perse, c’est qu’il n’était fait que comme le mariage d’Arlequin. Le département consentait, mais je demandais certaines choses qui ne m’étaient pas encore suffisamment garanties pour que je pusse regarder la chose comme faite et je vous ai écrit aussitôt la décision pourvue de tous ses élémens.

Je serais désolé de partir sans vous avoir vu, ainsi que Mme de Tocqueville, et ce sera pourtant du 5 au 10 février. Voulez-vous me permettre d’aller pour quelques heures avec vous à Compiègne ?

Je vous écris ceci au milieu des courses et entre deux épreuves à corriger. Aussi est-ce fort décousu. Soyez assez bon pour me le pardonner en faveur de l’affection si respectueuse et si vraie dont je n’ai pas besoin, je pense, de vous renouveler l’expression pour que vous en soyez sûr.

A. DE GOBINEAU.


Paris, 27 janvier.

Je veux vous écrire deux mois, mon cher ami, quoique je ne sois pas très en état de rien faire en ce moment. J’ai gagné, il y a quelques jours, une forte grippe, et quoique ce ne soit pas grave, il est prudent à moi de ne pas négliger une petite maladie de cette espèce après les grandes maladies qui me sont survenues durant les dernières années dans les organes de la respiration. Je me tiens donc bien coi au coin de mon feu, ne parlant pas et tâchant de ne pas penser beaucoup plus. C’est une raison de plus pour que je ne puisse pas consentir à ce que vous veniez ici. Par le temps qu’il fait et au moment d’un si long voyage, cette petite course d’ailleurs serait une corvée qu’à aucun prix je ne veux vous laisser faire. J’espère néanmoins vous voir, si Dieu nous envoie bientôt le dégel et que ma grippe me quitte. Je suis obligé d’aller à Paris le 7, à moins que ma santé ne s’y oppose absolument. On retarde toujours un peu son départ quanti il s’agit d’entreprendre un voyage comme le vôtre.