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mêmes et il n’y a plus personne au monde pour vous remplacer quand votre dégénération sera complète. La soif des jouissances matérielles qui vous tourmente est un symptôme positif. C’est un critérium aussi sûr que la rougeur des pommettes dans les maladies de poitrine. Toutes les civilisations en caducité l’ont eu avant vous et comme vous s’en sont applaudies. Le cœur me soulève à lire les phrases des journaux à ce sujet et je ne les lis jamais. Eh bien ! Y puis-je quelque chose et parce que je dis ce qui se passe et ce qui arrivera, ôtai-je la moindre chose à la somme de vos jours ? Je ne suis pas plus assassin que le médecin qui dit que la fin approche. J’ai tort ou j’ai raison. Si j’ai tort, de mes quatre volumes il ne reste rien. Si j’ai raison, les faits échappent à tout désir de les voir autrement que les lois naturelles ne les ont faits.

Je suis avec beaucoup d’intérêt l’impression produite par mon livre en différens endroits. En Allemagne, où, en général, on se préoccupe plus que chez nous de la vérité intrinsèque, il me paraît qu’on s’effraie un peu, mais qu’on insiste. J’ai conquis là de précieuses amitiés. En France, on se demande si je suis légitimiste, républicain, impérialiste, pour ou contre le journal l’Univers, mais on n’est pas flatté de voir que je ne prouve pas que les Français sont exclusivement le premier peuple du monde. Si je l’avais prouvé aux Anglais, je conçois qu’ils auraient pu en faire quelque chose ; mais, nous, à quoi cela aurait-il servi ? Il me semble que la conviction est acquise et que personne, à Paris, n’y contredit. En Amérique, c’est plus singulier que partout ailleurs. Trois personnes distinguées, que je ne connais pas, m’ont fait l’honneur de m’écrire. Une d’entre elles a traduit toute la partie systématique de l’ouvrage et me demande mon avis sur la seconde édition qu’il va publier, la première étant presque épuisée. Je n’ai pas vu cette première, mais, d’après ce qu’il me dit, il a conservé tout ce qui établissait la permanence des races et les effets des mélanges, c’est-à-dire la partie vive du système. Quant aux conséquences, il n’a pas osé les présenter à son public. Il n’a pas voulu leur dire que, du moment que les races étaient inégales, en se mariant à une race inférieure, on dégénérait. Cependant, j’entrevois qu’il ne leur a pas caché que la famille anglo-saxonne des Etats-Unis était supérieure à la nature mexicaine et que cette proposition a été acceptée sans nulle peine. Ce qu’il ne leur aura pas traduit, sans nul doute,