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On met donc Noailles dans le carrosse du Roi ; ce carrosse est précédé d’un carrosse de cour où se trouve le maître des cérémonies avec deux gentilshommes de la Chambre ; par derrière vient le carrosse de l’ambassade de France ; à droite et à gauche marchent des valets de pied du roi de Sardaigne, que la livrée du comte de Noailles encadre sur les deux ailes. Ainsi l’ambassadeur extraordinaire se rend à l’audience de Charles-Emmanuel III à travers les rues « bondées de peuple. » Au moment où les carrosses arrivent au Palais, la garde prend les armes et « rappelle. » Le Palais est bourré de suisses, de gardes, d’uniformes ; il y en a à toutes les portes, à toutes les encognures, sur chaque marche des escaliers. Le Palais est « rempli de la première noblesse. » Noailles est d’abord conduit à la salle des ambassadeurs, puis il est mené chez le Roi.

Devant le roi de Sardaigne, qu’il trouva seul avec son ministre, ainsi qu’il avait été convenu, le comte de Noailles fit son discours :


« Sire,

« Le Roi, mon maître, se devait à lui-même le désaveu qu’il a fait de ce qui s’est passé sur le territoire de Votre Majesté et la punition des coupables.

« Mais les sentimens qu’il a toujours eus pour la personne de Votre Majesté ne lui ont pas permis de se borner à une attention qui ne pouvait satisfaire que sa justice.

« Le Roi, mon maître, a voulu que cette circonstance servît à resserrer toujours davantage les liens de l’amitié qui ne l’unissent pas moins intimement à Votre Majesté que les liens du sang.

« Je viens ici en porter de sa part le témoignage le plus solennel.

« Rien n’est plus honorable pour moi que d’exécuter des ordres dictés par le cœur du Roi, mon maître, et d’assurer à Votre Majesté que son amitié lui sera toujours chère et précieuse. »

La composition de ce petit morceau d’éloquence diplomatique doit être attribuée à l’abbé Delaville, premier commis aux Affaires étrangères. Elle ne paraît pas avoir été des plus aisées, car on conserve aux Archives du quai d’Orsay plusieurs