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Russie et le Petit-Pamir à l’Afghanistan, a été le troisième instrument diplomatique qui ait consacré d’une façon officielle la prépondérance anglaise sur le pays afghan. En dehors de ces traités, des affirmations du gouvernement russe, réitérées depuis quarante ans, sont venues montrer que la Russie n’avait aucune prétention sur l’Afghanistan et qu’elle regardait ce pays comme placé dans la sphère d’influence anglaise. C’est d’abord la lettre dans laquelle le prince Gortchakof, en novembre 1859, donne « l’assurance positive que Sa Majesté Impériale considère l’Afghanistan comme complètement en dehors de la sphère où la Russie peut être appelée à exercer son influence ; » puis la déclaration faite dans le même sens, en février 1874, par le chancelier russe à lord Loftus, celle qui fut faite, en 1882, par l’ambassadeur de Russie à Londres à lord Granville, celle enfin par laquelle M. de Giers, en 1883, faisait connaître « que le gouvernement russe avait pris toutes les mesures pour éviter tous rapports entre la Russie et l’Afghanistan, ce dernier pays étant considéré comme rentrant dans la sphère d’influence britannique. » Et c’est en toute vérité que récemment, le 20 octobre 1902, lord Cranborne pouvait affirmer que la Russie considérait l’Afghanistan comme en dehors de sa propre sphère d’influence.

Dans ces dernières années, deux accords intervenus entre le gouvernement anglo-indien et l’émir d’Afghanistan ont resserré encore les liens qui unissent ce pays à l’Angleterre. La mission Mortimer Durand a obtenu, en 1893, de la part de l’émir Abdurrhaman confirmation de ses engagemens antérieurs, et, pour le dédommager de la cession de ses territoires à l’Est des monts Souleïman, lui a alloué une somme annuelle de trois millions de francs. Par un second accord conclu en 1905, Habib-Oulla, successeur d’Abdurrhaman, s’est engagé « à remplir les clauses des accords signés par son père avec la Grande-Bretagne au sujet des affaires extérieures et intérieures de l’Afghanistan, et à n’y contrevenir par aucune action et par aucune promesse. » Sous ces termes, il faut entendre les accords conclus entre le gouvernement anglo-indien et Abdurrhaman au moment de l’accession au trône de ce dernier et lors de la mission de sir Mortimer Durand, en 1893, à Caboul.

Mais la lutte d’influence entre Anglais et Russes, close par ces traités en Afghanistan au bénéfice de l’Angleterre, devait se transporter en ces dernières années sur un autre terrain :