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Les bases du nouvel établissement étaient très larges, trop larges même, car l’étendue et la diversité des opérations indiquaient une hardiesse plutôt voisine de la témérité. Cette maison de crédit faisait, non seulement toutes les opérations courantes des banques dites de commerce : escomptes, recouvremens, avances sur garanties, etc. ; mais encore des opérations d’un autre ordre et beaucoup plus aléatoires : elle traitait par exemple soit à elle seule, soit en participation avec d’autres banques, de tous les emprunts d’Etat ; enfin elle s’ouvrait un champ d’action, sans limites, puisqu’elle devait « en général faire toutes les opérations financières. » Cette conception nouvelle, fort différente de celle des banquiers qui, sous l’Empire et la Restauration, avaient été les confrères de Laffitte, et dont nous avons, plus haut, indiqué la méthode prudente, consistait à confondre des risques de nature diverse et de degrés très inégaux. Une banque de commerce se livrant à des opérations de spéculation, de placement, à des commandites plus ou moins directes faites à des entreprises industrielles, court bien des aventures. Le caractère des opérations de banque, dites commerciales, se révèle par ce fait que le crédit y repose sur une valeur créée en représentation d’une marchandise dont le prix est fixé par une vente réelle, par une transaction première. Et cette valeur est le papier commercial escompté pour un temps relativement court. Les capitaux, avec lesquels travaillent les banquiers de cet ordre, ont donc un mouvement continu de circulation, de va-et-vient. Ils sortent et ils rentrent pour ainsi dire sans interruption et constituent ce que l’on appelle des « disponibilités. » Ils sont comme des soldats qui, dans l’action, se rallient très vite autour de leur chef et sont, pour ainsi dire, dans sa main. Au contraire, le lancement d’une affaire industrielle, la coopération à la soumission d’un emprunt de ville ou d’Etat, l’ouverture de gros crédits à découvert consentis à des commerçans et industriels, sont autant d’opérations souvent à longue échéance et comportant des risques très étendus, tous les risques de la spéculation. Ces opérations donnent, en général, lorsqu’elles réussissent, de gros bénéfices. Les maisons qui s’y livrent ont assurément une