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au dehors, dans la Méditerranée et jusqu’en Ethiopie, un champ d’action pour le surcroît d’énergie nationale que l’achèvement de l’unité laissait inemployé. Crispi suit de près les affaires de Turquie, il commence à nouer des intelligences parmi les Albanais ; en adhérant à la Triple Alliance, il y cherche un moyen de tenir en bride les ambitions de l’Autriche-Hongrie dans les Balkans. L’apostolat national italien se fait surtout par la langue qu’on espère voir bientôt régner, victorieuse du français, dans tout le Levant méditerranéen ; des sociétés puissantes, comme la Dante Alighieri et l’Umanitaria, travaillent à en répandre au loin, surtout dans l’Empire ottoman, la connaissance et l’usage. Elles sont à la fois subventionnées par le gouvernement et patronnées par la franc-maçonnerie. C’est l’Italie de Mazzini et de Garibaldi qui continue son œuvre sous la même impulsion qui l’a portée sur la brèche de la Porta Pia ; elle est anticléricale, antipapaline et triplicienne. Les écoles qui sont fondées dans les ports du Levant distribuent un enseignement non seulement laïque, mais nettement hostile au catholicisme. Les consuls italiens ignorent les évêques. Quand une escadre visite les « Echelles, » les officiers ont pour consigne de ne connaître que les écoles laïques. C’est le temps où l’Italie prend, dans la Triple Alliance, le rôle d’agent provocateur et où, dans la Méditerranée comme dans l’Europe centrale, elle entre dans toutes les combinaisons peu sympathiques à la France. Elle engage les puissances tripliciennes et l’Angleterre dans une sorte de coalition, dont elle tient les fils, contre le Protectorat français qui lui apparaît comme la clef de voûte de notre influence en Orient. Presque simultanément la mission de M. Dunn et celle du général Simmons à Rome, sous couleur de demander au Pape la création de nonciatures à Pékin et à Constantinople, ont surtout pour objet » d’attaquer indirectement le Protectorat français et de seconder les efforts du Quirinal pour la nationalisation des missions. L’Alliance nationale pour la protection des missionnaires italiens, subventionnée par le gouvernement, travaille dans le même sens, et le cardinal Préfet de la Propagande déclare que le Vatican et les évêques ne peuvent avoir aucun rapport, malgré son titre et son but apparent, avec cette société dont les attaches maçonniques sont notoires.

C’est à cette conspiration, qui menace à la fois les intérêts français et ceux de la catholicité, que Léon XIII, éclairé par