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ouvertement devant les gens, ce qu’il ne devrait pas faire, et se domine difficilement. Il désire ardemment qu’on attache créance à ce qu’il dit, et je dois dire que je suis disposée à me fier à ses promesses personnelles. Ses sentimens sont très ardens ; il est très sensible à la bonté, et son amour pour sa femme et ses enfans, pour tous les enfans, est très grand. Il aime beaucoup la vie de famille : il me disait, quand nos enfans étaient dans la pièce : Voilà les deux momens de notre vie. Il ne fut pas seulement poli, mais extrêmement aimable pour nous deux, et fit le plus vif éloge du cher Albert à sir Robert Peel : il souhaiterait, lui dit-il, que tout prince en Allemagne eût cette intelligence et ce jugement. Il témoigna une grande confiance à Albert ; et je crois que [ces gestes et ces paroles] auront un effet salutaire. En effet, si le Tsar fait l’éloge de [mon mari] à l’étranger, ces complimens pèseront d’un grand poids. [L’Empereur] n’est pas heureux, et cette mélancolie, qui se trahit dans ses attitudes, m’attrista parfois. La dureté du regard diminue beaucoup dès qu’on le connaît : elle varie d’ailleurs suivant qu’il est embarrassé ou non, — sa timidité est réelle, — suivant qu’il est animé, car il est disposé aux congestions. Mon ange croit qu’il cède, de par son tempérament, aux impulsions et aux sentimens, ce qui fait qu’il agit souvent de travers. [L’Empereur] admire beaucoup la beauté, et, quand il était en voiture avec nous, sa manière de regarder les jolies personnes me faisait beaucoup penser à vous. Mais il reste très fidèle à celles qu’il admira il y a vingt-huit ans, par exemple à lady Peel, qui n’est guère plus qu’une ruine. Pour ce qui est de la Belgique, il ne m’en parla pas, mais s’en entretint avec Albert et les Ministres. Quant à avoir un sentiment malveillant à votre égard, il le nie formellement, et dit qu’il vous connaît bien, que vous avez servi dans l’armée russe, etc. : ces malheureux Polonais sont le seul obstacle [entre vous], et il affirme qu’il ne peut pas entrer en communication directe avec la Belgique, tant qu’on les emploiera. Si vous pouviez, d’une façon ou d’une autre, vous débarrasser d’eux, je suis sûre que le [rapprochement] serait fait immédiatement. Nous trouvons tous qu’il n’y a guère besoin de s’inquiéter de cet incident, mais je crains qu’il n’ait pris des engagemens. Pour finir, je veux vous dire un ou deux mots de plus sur son physique. Il nous rappelle beaucoup ses cousins et les nôtres, les Wurtemberg, et on retrouve beaucoup en lui de la famille de Wurtemberg. Il est chauve maintenant, mais dans