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officiellement confirmée : on la présentait toujours comme une croisière d’instruction, absolument pacifique.

C’est ce que disait avec beaucoup de mesure l’amiral Evans, aussitôt interviewé : « Il est absurde, déclarait-il, de voir dans le voyage de l’escadre une démonstration destinée à peser sur un gouvernement ami tel que le gouvernement japonais. Le fait que quelques voyous ont saccagé un restaurant japonais à San Francisco ne peut pas être un motif de guerre avec le Japon. Des incidens locaux de ce genre et de cette importance sont toujours faciles à régler. » L’amiral Brownson, dans un discours prononcé à Oyster Bay, tenait le même langage : « La marine américaine, disait-il, se propose de donner au monde la preuve qu’elle est capable de protéger les deux côtes des États-Unis. Mais il ne saurait y avoir, pour faire cette démonstration, d’époque plus propice que celle où nous sommes, les États-Unis étant en paix parfaite avec toutes les nations. » L’amiral Dewey, avec des sous-entendus qui pouvaient sembler menaçans, déclarait lui aussi que la mission de la flotte était toute pacifique. Il ajoutait seulement : « Alors même que la paix n’est pas en danger, il est préférable d’être prêts... La présence de notre escadre dans le Pacifique peut être utile à tous les points de vue. » Enfin M. Metcalf, devenu ministre de la Marine, affirmait que l’envoi des cuirassés dans les eaux orientales ne se rapportait en aucune manière aux questions débattues amicalement entre les États-Unis et le Japon.

Malgré certains mouvemens de nervosité, ces raisons et ces assurances eurent un meilleur effet qu’on ne l’avait d’abord espéré. Il y eut bien, dans des journaux japonais, des attaques contre la marine des États-Unis, ou contre leur politique. Le journal du marquis Ito notamment publia un article assez vif. Mais dans l’ensemble, le calme de l’opinion fut vite rétabli, et il est juste de reconnaître que le gouvernement japonais ne négligea rien pour y contribuer. Pendant un séjour qu’il fit à New-York à cette époque, l’amiral Yamamoto, dans un toast applaudi, s’écria : « Les Japonais se rappelleront toujours la sympathie que leur ont témoignée les Américains durant la dernière guerre. Je suis convaincu que les relations cordiales existant depuis cinquante années entre les deux pays ne peuvent pas être ébranlées par des incidens sans importance. » Simultanément, le vicomte Aoki faisait publier la déclaration