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nous apparaît comme une œuvre de spécialisation, qui permet à chaque pays de produire certaines denrées ou certains objets dont les débouchés au dehors sont assurés. Dans ces conditions, on comprend fort bien que la crise américaine ait son contre-coup à Hambourg, à Berlin, à Francfort, à Essen, en Silésie, et dans les divers centres industriels allemands : mais le remède naît du mal lui-même. Les États-Unis, en restreignant leurs achats au dehors augmentent peu à peu leurs disponibilités à l’intérieur ; à New-York, l’argent est redevenu si abondant que les prêts au jour le jour s’y font à 2 p. 100 ; les réserves des banques, qui étaient tombées, au cours de l’automne 1907, bien au-dessous du minimum légal, lui sont de nouveau largement supérieures, le chiffre des exportations dépasse celui des importations dans une proportion rarement atteinte. Au bout de quelque temps, l’Amérique sera donc en mesure de reprendre ses achats au dehors ; la question pour les industriels allemands aura été d’attendre cette reprise et de traverser sans trop de dommage la période intermédiaire : or la plupart d’entre eux le peuvent.


VII

La conclusion de cette étude nous paraît devoir être l’examen d’une question qui a été maintes fois agitée dans les derniers temps et qu’il convient d’aborder nettement : c’est celle de la participation de la France, en d’autres termes, des financiers et des capitalistes français, aux entreprises allemandes.

Nous n’apprendrons rien à nos lecteurs en leur rappelant que déjà depuis longtemps les Français ont pris quelque intérêt dans plusieurs de cas affaires. Les rapports, qui étaient assez fréquens avant 1870, ont été naturellement suspendus à la suite de la guerre et n’ont recommencé à se manifester avec une certaine activité que vers la fin du XIXe siècle. Le problème a paru se poser avec une insistance plus marquée en 1907, lorsque la différence de situation entre les marchés s’est accentuée : d’un côté, l’engorgement produit par un excès de créations et d’affaires, de l’autre, une abondance de disponibilités qui maintenait le loyer des capitaux à Paris à un taux considérablement inférieur à celui qui se pratiquait à Berlin. Il était naturel que les banquiers de notre pays songeassent à faire fructifier une partie de leurs ressources liquides en les employant à des avances, des escomptes,