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mois d’automne, le châtelain offre à ses nombreux amis une hospitalité digne des grandes traditions du passé.

Dès la fin du XIIIe siècle, une population nombreuse s’était groupée autour du couvent. C’est dans ce hameau que naquit, sur le déclin du quattrocento, le chantre du lac, Matteo dell’Isola. Il rimait déjà en 1520. Plus tard, il tint école de grammaire et de littérature à Fojano, en Toscane. Disciple des humanistes, il écrivait encore en latin, comme Fracastor et Navagero, au moment même où l’Arioste terminait le Roland furieux. Au nombre de ses ouvrages, il convient de citer la Trasimenide, poème didactique d’un style élégant et facile que goûtèrent ses contemporains, mais qui ne fut imprimé qu’en 1843. Dans cet ouvrage inspiré des Géorgiques de Virgile, Matteo célèbre le lac, ses habitans et leurs mœurs, la chasse et la pêche[1].

Danzetta nous assure que les pêcheurs du Trasimène sont superstitieux à l’excès. Quand, en automne, les étoiles filantes traversent le ciel par milliers, donnant l’illusion d’une pluie de feu, on cesse de naviguer la nuit sur le lac. Quelquefois, par les soirées humides et sombres, de petites flammes se posent sur le chapeau ou sur les rames des bateliers. Ces feux follets, présage infaillible de troubles atmosphériques, causent des frayeurs extrêmes. C’est aussi sans doute l’imagination en travail qui a fait voir à de nombreux témoins des fantômes errant la nuit à travers les taillis de l’isola Minore.


VII

Après avoir chanté le grand carnage dont le Trasimène fut témoin, Childe Harold est frappé du contraste que présentent les lieux environnans :


Fer other scène is Trasimène now ;
Her lake a sheet of silver, and her plain
Rent by no ravage save the gentle plough ;
Her aged trees rise thick as once the slain
Lay where their roots are.
(Byron, Childe Harold, ch. IV, 65.)
  1. La Trasimenide débute ainsi :
    Est lacus Hetruræ Trasimenis nomine dictus ;
    Hunc pete ; tende chelym hic puriter, plectrumque, lyramque
    Hic quogue, Diva tuo, si vis, succurre tironi.