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de femmes attaquent la population dans sa racine. On ne peut pas calculer la perte, pour un État, de dix mille femmes cloîtrées : la guerre nuit très peu, parce que le nombre des mâles est d’un vingt-cinquième au moins en sus des femmes. On pourrait tout au plus permettre les vœux à cinquante ans ; à cette époque, leur tâche est remplie. » Le souverain se considérait dans l’Eglise en pays conquis : les congrégations ne seraient pas plus indépendantes de son autorité que le clergé diocésain. Le 2 germinal an XIII, — 23 mars 1805, — un décret nommait Madame mère « protectrice des Sœurs hospitalières et des Sœurs de charité dans toute l’étendue de l’Empire. » L’Empereur, dominé par son goût de la centralisation, signa un décret, en date du 30 septembre 1807, qui prescrivait la tenue à Paris d’un chapitre général des établissemens des Sœurs de charité. Le chapitre devait se réunir dans le palais et sous la présidence de Madame. L’abbé de Boulogne, grand aumônier, y exercerait les fonctions de secrétaire. Le chapitre repoussa dans son rapport l’unification absolue, maintint la diversité des statuts des différentes communautés, mais ne s’opposa pas à une certaine fédération dans les diocèses.

Les congrégations enseignantes n’avaient pas attendu la publication du Concordat pour se reconstituer ; elles étaient en assez grand nombre dans le quartier Saint-Jacques et dans le Marais. Des Jacobins attardés cherchèrent à les inquiéter ; Portalis prit vivement la défense des pensionnats religieux en montrant à l’Empereur leur supériorité sur les pensionnats laïques. « Les documens, — dit notre historien, — ne relatent aucune fermeture de couvent ni aucun retrait d’autorisation. » En 1810, Napoléon confia à la congrégation de la Mère de Dieu les quatre maisons d’éducation de la Légion d’honneur. — M. de Lanzac de Laborie ne mentionne pas d’autre congrégation contemplative que celle des Carmélites qui habitaient l’ancien couvent des Carmes, rue de Vaugirard. Cette communauté, dont Mme de Soyecourt était la supérieure, ne fut point dissoute. Il est vrai que ces religieuses ne suivaient pas la règle du Carmel dans toute sa rigueur et qu’elles portaient le costume laïque, sauf pendant les jours de la retraite annuelle.

La société était peu soucieuse d’observer les prescriptions de l’Église. Le culte était considéré comme une institution nécessaire, mais les idées philosophiques du siècle précédent