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qu’ils poursuivent. Les explications données par la suite n’en ont pas atténué le premier effet, qui a été très vif : il n’en reste pas moins qu’aux yeux de tous, l’Allemagne a voulu et continue de vouloir faire au Maroc autrement que les autres puissances, ce qui diminue la force que l’Europe aurait pu trouver dans une union plus complète..

M. Vassel, consul d’Allemagne à Fez, n’est pas un inconnu pour le monde diplomatique : il a été le conseiller, l’inspirateur, le protecteur d’Abd-el-Aziz, au moment où le malheureux sultan suivait avec docilité les suggestions allemandes, croyant y trouver son salut. Dès le premier jour où la politique française s’est dessinée au Maroc dans un sens qui aurait pu en faire plus vite un pays civilisé, M. Vassel s’est appliqué à exciter les appréhensions du Sultan et l’a déterminé à se jeter dans ses bras. Il ne faut pas oublier, en effet, que si Abd-el-Aziz a pu passer dans ces derniers temps pour jouir des préférences françaises, il avait commencé par être contre nous le favori et même le champion de l’Allemagne : mais celle-ci l’a lâché au bon moment, avec la facile désinvolture qu’elle apporte dans ce genre d’opérations. Les événemens se sont depuis compliqués, précipités, assombris. L’exaltation du fanatisme musulman est devenu un péril pour tous les Européens au Maroc : ils ont dû quitter les villes et se réfugier dans les ports, notamment à Tanger. C’est là que M. Vassel a passé de longs mois, attendant, comme ses collègues, des circonstances plus heureuses pour rejoindre son poste. Il a jugé, ou plutôt on a jugé à Berlin que le moment était venu pour lui de le faire et il a pris le chemin de Fez, sans attendre la reconnaissance du nouveau sultan, en vertu d’un proprio motu que rien n’avait fait prévoir. Bien plus ! il est parti la nuit, en secret, en donnant à son départ les allures mystérieuses d’une conspiration. Tant de précautions devaient être suspectes : l’opinion européenne s’en est préoccupée. Alors les journaux allemands, qui sont très ferrés sur les principes du droit public, ont expliqué qu’un consul n’était pas un agent politique : M. Vassel n’était allé à Fez que pour veiller aux intérêts commerciaux de ses compatriotes, intérêts qui avaient gravement périclité depuis une année et avaient besoin d’être relevés par une main exercée, habile et prompte. Il ne fallait pas voir autre chose dans sa mission. On aurait voulu le croire, et pourtant personne ne l’a cru. Un consul n’est pas un agent politique, cela est vrai, mais il le devient quelquefois par la force des circonstances, et les cas de ce genre abondent dans toutes les mémoires. Au reste, il n’y en a pas de plus probant que celui de M. Vassel lui-même dans