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« l’assemblage le plus extraordinaire de perfidie et de mensonges ; » il ne cessait de promettre une chose et d’en faire une autre. Dans un intérêt électoral, le gouvernement français crut devoir répandre la nouvelle que l’intervention française en faveur des Polonais était favorablement accueillie par le Cabinet russe. « C’est au milieu d’une nation et surtout d’une capitale en état constant d’irritation et d’émeutes, » écrivait Pozzo, « avec un Roi qui dégrade chaque jour son titre afin de le conserver pour le lendemain, et avec un ministère dont le chef est à la vérité un homme respectable et doué de moyens peu communs, mais qui est lui-même soumis à ses préjugés et à la violence des hommes et des circonstances, qu’il faut conduire les affaires dont la paix et la guerre et le sort de l’Europe dépendent à chaque instant. » Pozzo, de plus en plus pessimiste, appelait la France « une planète irrégulière et malfaisante, » dont les évolutions sont « si excentriques et soudaines qu’elles échappent à la prévoyance et au calcul. » « Je finis cette dépêche, » écrivait-il le 2/14 juillet 1831, « à la veille de l’épreuve la plus imposante que le monde ait jamais subie. Acteurs et spectateurs, nous sommes tous dans l’incertitude la plus complète. Le roi Louis-Philippe ne sait pas ce qu’il peut vouloir et le ministère ce qu’il peut obtenir. » L’Empereur puisait dans ces rapports la conviction qu’une guerre européenne pouvait éclater d’un jour à l’autre. Toutefois, il espérait prévenir cette catastrophe par de bons conseils aussi bien que par des menaces.

Dans la question belge, au début, le gouvernement impérial prit acte avec satisfaction du refus de Louis-Philippe d’admettre le Duc de Nemours au nouveau trône. L’élection faite, le Roi se montrait enclin à reconnaître le fait accompli, mais le Cabinet de Saint-Pétersbourg le força de refuser son consentement à cette combinaison.

Dans la question polonaise, l’empereur Nicolas n’admettait pas l’idée d’une intervention quelconque de puissances étrangères. Mais, d’autre part, il déclara à Paris que les Autrichiens avaient le droit légitime d’intervenir dans les affaires d’Italie et que, si les Français se proposaient d’y faire opposition, la Russie serait en mesure de prêter immédiatement assistance à l’Autriche. Cette décision péchait peut-être quelque peu par absence de logique ; c’est toutefois dans ce sens que le comte Pozzo di Borgo fut appelé à s’expliquer avec les ministres