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de Bonaparte, dont le despotisme est aussi incompatible avec la sûreté générale de l’Europe qu’avec le bien-être de la France même ; que Sa Majesté Impériale connaît parfaitement bien la différence très marquée qui doit être faite entre la nation française et l’heureux aventurier qui l’a fait plier sous son joug ; qu’il ne peut nullement être question d’en vouloir à celle-là, et que, bien au contraire, il ne s’agit que de la délivrer du joug sous lequel elle gémit ; que, dès lors, les résultats d’une pareille guerre ne pourront que tourner à l’avantage de la grande majorité du peuple français, dont les intérêts à cet égard sont les mêmes que ceux des puissances alliées.

« De plus, vous assurerez le général que l’Empereur est fermement intentionné de faire respecter les droits, biens et propriétés d’un chacun et nommément ceux des acquéreurs de biens nationaux ; enfin, vous ajouterez que Sa Majesté est très éloignée de vouloir gêner le moins du monde le vœu de la nation pour tout ce qui regarde l’intérieur ; qu’Elle sera prête à sanctionner tout, mode d’administration que les habitans, d’un vœu libre et spontané, voudront se donner et que, surtout, Elle n’est nullement guidée par une prédilection quelconque pour la maison de Bourbon.

« A l’égard de ce dernier point, il ne serait pas superflu cependant de sonder le général Moreau sur sa manière d’envisager les droits de la Maison royale, ainsi que sur la possibilité de réunir tous les partis si l’on remettait un Bourbon sur le trône, avec les restrictions et modifications qu’exigent les circonstances, et surtout l’opinion publique, qui règne en France.

« Vous chargerez la personne que vous emploierez, dans cette occasion, d’approfondir la manière de penser du général sur cet objet, mais avec la plus grande réserve et en évitant surtout de détruire l’assurance qu’on lui aura donnée à cet égard.

« Je me suis borné à vous indiquer les principaux argumens qui me paraissent capables de décider le général Moreau à se prêter à nos vues et j’abandonne à vos soins d’y ajouter tout ce qui pourra contribuer au succès. Vous êtes même autorisé à lui confier en cas de besoin, mais avec toutes les précautions qu’exige la prudence, le plan et le but de la coalition, ainsi que les moyens que l’on se propose d’y employer. Vous relèverez à ses yeux la nouvelle gloire dont il pourra se couvrir et la reconnaissance qu’il méritera de sa patrie, en coopérant aux efforts