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nier mot. Le directeur de cette section, beaucoup plus stable que le préfet, puise dans cette permanence une partie de sa force ; il appartient à ce corps du génie maritime qu’a illustré Dupuy de Lôme et qui comprend des officiers d’une très haute valeur.

L’artillerie et l’atelier central de la flotte viennent ensuite, et opèrent des travaux analogues. Ces trois directions emploient un outillage à peu près semblable, des ouvriers des mêmes professions, ajusteurs, chaudronniers, fondeurs, tôliers, riveurs… Pourtant, chacune d’elles a son personnel particulier et ses ateliers, de sorte que plusieurs installations font triple emploi. Et si l’on prend l’ensemble des services de l’arsenal, on arrive à des résultats surprenans. L’un des arsenaux a quatre magasins de bois (constructions navales, artillerie, travaux hydrauliques et atelier de la flotte). Un autre a douze dépôts de charbon. Certaines directions ont pléthore d’ouvriers et manque de travail, tandis qu’à côté, il y a pléthore de travail et pénurie d’ouvriers. Au lieu de constituer une vaste usine, l’arsenal est donc un conglomérat d’arsenaux minuscules, ayant leurs besoins, leur matériel, leur personnel. L’autonomie, dont jouissent les directions, accentue encore le particularisme. Est-il excessif de dire que l’arsenal est le type de l’exploitation irrationnelle ?

D’autre part, ces usines dans l’usine ont un outillage insuffisant, parce que le Parlement vote généralement des lois incomplètes. Le programme ne porte point, en face des unités à construire, les modifications correspondantes que réclame l’outillage. Par suite, c’est le poids du progrès qui pèse sur notre établissement naval. Les bassins de radoub sont trop courts ; les ateliers sont trop éloignés les uns des autres ; les machines-outils, de modèles antédiluviens ; nos moyens de ravitaillement tout à fait inférieurs ; nos dépôts de munitions, trop dispersés. Le Parlement a voté pour la première fois en 1901, parallèlement au programme de la flotte, les crédits nécessaires à ces transformations indispensables dans les ports et les points d’appui. En 1906, le ministre a demandé 1 million pour améliorer l’outillage. En 1907 et 1908, la somme affectée à cet objet n’a pas dépassé 200 000 francs. Ce n’est malheureusement qu’une goutte d’eau dans la mer, et cet outillage laisse fort à désirer. Brest et Toulon n’ont pas assez de bassins de radoub. Bizerte en a deux et manque d’ouvriers.

Après ce rapide examen de l’outillage et de l’utilisation des