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de 5 kilos avec une vitesse de 490 mètres, ou de 6 kilos avec une vitesse de 448 mètres. Un pareil poids permettait de faire un bon shrapnel ; le canon à tir rapide était réalisable.

La grande difficulté fut alors de convaincre les artilleurs qui ont toujours montré le plus grand attachement pour les gros calibres.

Dès qu’on résolut de faire les études d’un matériel nouveau, nos officiers dépassèrent de beaucoup les données du programme de 1886.

Cette étape du progrès était importante, parce qu’elle permettait d’envoyer sur l’ennemi, dans un même temps, avec une seule pièce, 140 kilos de projectiles par minute au lieu de 17 environ.

Ce n’était pas tout : l’absence du recul permit de munir la pièce d’un bouclier mettant les servans à l’abri des balles. Cette addition a autant d’importance que l’accroissement de la rapidité du tir par ses conséquences tactiques. L’artillerie acquiert une assez grande invulnérabilité qui, logiquement, doit la rendre plus mordante, plus offensive.

Un autre avantage du matériel à tir rapide est la facilité avec laquelle l’artillerie peut maintenant envelopper l’ennemi d’un nuage épais de fumée, en raison de la multiplicité des coups envoyés dans un temps très court. D’autre part, avec des salves tirées à des hausses différentes, on peut battre simultanément, avec une extrême violence, une zone profonde d’au moins 400 à 500 mètres.

Enfin un système de pointage perfectionné permet d’exécuter facilement le tir manqué. L’artillerie peut se placer derrière les crêtes, en dehors des vues, tout en étant maîtresse de son tir, pourvu que le commandant de batterie voie son objectif. C’est l’annulation définitive de l’initiative des servans, la diminution du rôle des sous-officiers et des lieutenans ; mais c’est une propriété nouvelle qui, ajoutée au bouclier, réduit encore la vulnérabilité. Lorsqu’une batterie est placée peu en arrière de la crête, elle décèle encore sa présence par la lueur fugitive de ses coups de canon, mais l’adversaire ne peut déterminer avec, précision sa position et doit, pour toucher, battre une zone très profonde. Si la batterie est placée assez en contre-bas de la crête, la lueur de ses coups est invisible ; elle devient à peu près invulnérable. Mais le commandement d’une batterie à