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comparatives de tir entre des batteries de 4 et des batteries de 6 pièces. Ces dernières avaient dû, en quelques jours, se mettre au courant des méthodes nouvelles improvisées qu’on leur faisait appliquer. Leur situation était donc tout à fait désavantageuse, par rapport à celle des batteries de 4 canons, rompues depuis des années à une méthode mûrement étudiée. Malgré ces conditions défectueuses, les batteries de 6 pièces ont soutenu la comparaison et les officiers qui les ont commandées, ou qui les ont servies, estiment, avec certains chefs éminens de notre artillerie, qu’il faut très peu de temps pour former le, personnel à une nouvelle méthode. Du reste, il est tout à fait inutile que l’instruction du personnel marche plus vite que la constitution de l’approvisionnement en munitions correspondant.

Supposons même, ce qui n’est pas prouvé, que la batterie de 6 pièces ait une légère infériorité ; dans l’ensemble, cette infériorité ne serait-elle pas compensée par la plus grande facilité du recrutement des sujets d’élite ? Personne ne saurait nier cependant qu’il est plus facile dans un corps d’armée de trouver 24 bons commandans de batterie que 36. Cette infériorité hypothétique ne serait-elle pas compensée plus largement encore par les économies réalisées, qui seraient appliquées à une augmentation de nos approvisionnemens, de nos moyens de ravitaillement, de nos moyens d’instruction ?

Cette deuxième solution serait donc acceptable et peu coûteuse. Si, dès le jour où l’on a compris la nécessité d’augmenter le nombre de nos bouches à feu, on l’avait adoptée résolument, ce serait chose faite ; on n’aurait pas eu à faire appel au Parlement qui n’est pas intervenu lorsqu’on a supprimé deux pièces par batterie. L’irrésolution et le manque de décision sont toujours des causes de faiblesse. Aujourd’hui, si l’on veut à tout prix donner satisfaction immédiate à l’opinion publique, ce qui n’est pas négligeable au point de vue moral, il convient donc de revenir à la batterie à 6 pièces. Mais ce serait un simple trompe-l’œil, parce que nous ne pourrions alimenter aujourd’hui cette masse de bouches à feu. Les 92 canons que nous avons sont largement suffisans pour brûler toutes les cartouches que nous sommes en état de leur apporter, et au delà. Peut-être pourrait-on le faire comprendre au public ? L’effet moral de l’augmentation immédiate du nombre de nos bouches à feu serait d’abord excellent. Mais que de déceptions pourraient