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compatriote ; le roi de Prusse, un voisin à qui n’appartiennent pas, à ce titre, des droits que ne peut fonder qu’une cession volontaire, consentie par des princes et des peuples allemands. Je crois que le titre d’Empereur allemand pour le Président de la Fédération des États, permettra à ceux-ci d’accepter plus facilement un chef suprême. L’histoire enseigne que les grandes maisons souveraines de l’Allemagne, y compris la Prusse, n’ont jamais considéré l’existence de l’Empereur choisi par elles comme une diminution de leur propre situation en Europe. » Suivant Bismarck, le roi Louis II pouvait donc faire plus décemment les concessions déjà accordées à l’autorité de la Présidence, s’il les faisait à un empereur allemand au lieu de les faire à un roi de Prusse. Le chancelier croyait que l’appréciation politique et dynastique de la différence entre les droits présidentiels impériaux allemands et les droits royaux prussiens devait être d’un poids décisif. Alors il rédigea lentement, posément, avec une belle écriture gothique, la lettre au roi de Prusse, que le roi de Bavière devait recopier mot à mot. Il chargea le comte Holnstein de répéter au Roi qu’il s’était inspiré de cette pensée, dont tous les Allemands étaient pénétrés, que le titre d’Allemand seul attestait que les droits transmis à l’Empereur provenaient de la libre délégation des princes et des peuples allemands et réservait l’indépendance des États alliés. Bismarck insistait à cet égard pour adoucir les exigences du roi de Bavière, qui aurait voulu que la présidence de la Fédération des États alternât héréditairement entre les Hohenzollern et les Wittelsbach.

Louis II n’accueillit le comte Holnstein que sur l’assurance formelle qu’il venait de la part du chancelier. Puis il répondit le 2 décembre au comte de Bismarck qu’il attachait un grand prix aux sentimens dévoués d’un homme tel que lui sur lequel l’Allemagne entière levait les yeux avec joie et orgueil. Il consentait à écrire la lettre au roi de Prusse, heureux de faire une démarche décisive en faveur de la cause nationale, mais en se disant assuré que la Bavière conserverait sa situation, parfaitement compatible d’ailleurs avec une politique fédérale sincère, La lettre au roi de Prusse, un peu modifiée par Louis II, était ainsi conçue : « Par suite de l’entrée de l’Allemagne du Sud dans la Confédération constitutionnelle allemande, les droits de Présidence confiés à Votre Majesté s’étendraient sur tous