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Serait-il possible d’arriver à ce même résultat d’un salaire assurant à l’ouvrière le minimum nécessaire à la vie sans l’intervention du législateur et par une entente amiable entre patrons et ouvriers, ou plutôt ouvrières, puisque nous ne nous occupons ici que du travail féminin ? Une intéressante tentative en ce sens a eu lieu récemment, et, bien qu’elle n’ait abouti jusqu’à présent à aucune conséquence pratique, il convient cependant de ne pas la passer sous silence.

Le groupement lyonnais connu sous le nom de Fédération nationale des syndicats indépendant de femmes, dont nous avons parlé tout à l’heure, a pris l’initiative de s’adresser à toutes les chambres syndicales de patrons dans l’industrie du vêtement pour leur demander de consentir à la fixation d’un tarif minimum qui serait arrêté d’accord entre syndicats patronaux et syndicats d’ouvrières. Mlle Rochebillard, après avoir, dans une pétition éloquente, rappelé toutes les souffrances qu’inflige aux femmes l’insuffisance de leurs salaires, insuffisance qu’elle attribue à l’âpreté de la concurrence entre patrons, les adjure de mettre eux-mêmes un terme à cette concurrence en assurant aux ouvrières qui travaillent aux pièces ou à la journée une rémunération uniforme et suffisante. Cette rémunération devrait, suivant Mlle Rochebillard, garantir à toute ouvrière au-dessus de dix-huit ans un salaire minimum de 1 franc par jour dans les petites villes et les campagnes, de 1 fr. 50 dans les villes de 10 000 à 100 000 habitans, de 2 francs par jour dans les villes de plus de 100 000 habitans. Assurément la prétention, en soi, est modeste, et il est douloureux de penser qu’à Paris, par exemple, assurer à l’ouvrière un gain de 2 francs par jour puisse être considéré comme un progrès. L’initiative de Mlle Rochebillard a été appuyée à Paris, auprès de la puissante Chambre syndicale des tissus et matières textiles, par M. Lefébure qui est un de ses membres les plus importans, et c’est sans doute à l’intervention d’une personnalité aussi considérable du commerce parisien qu’il faut attribuer la bonne volonté que la Chambre syndicale avait semblé tout d’abord apporter à l’étude de cette question, car elle a poussé cette bonne volonté jusqu’à nommer une commission qui a fait un rapport. Le rapport reconnaît l’intérêt de la question et il « proclame que si tous ceux qui donnent du travail à l’entreprise pouvaient se mettre d’accord sur les prix de façon, ce serait un grand pas fait dans la