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rarement des tremblemens de terre, dont le dernier date de 1875. La conséquence doit s’appliquer à plus forte raison aux Alpes, qui sont encore le théâtre de fréquens séismes. On lira avec intérêt à ce sujet le passage suivant de la célèbre Recepte véritable que Bernard Palissy publia en 1563 :

« Le dit feu, dit-il, se nourrit et entretient aussi sous la terre ; et advient souvent que par un long espace de temps aucunes montagnes deviendront vallées par un tremblement de terre ou grande véhémence que le dit feu engendrera, ou bien que les pierres, métaux et autres minéraux qui tenoyent la base de la montagne se brusleront et en se consommant pour feu, la dite montagne se pourra incliner et baisser petit à petit ; aussi d’autres montagnes se pourront manifester et eslever par l’accroissement des roches et minéraux qui croissent en icelles ; ou bien, il adviendra qu’une contrée de pays sera abysmée ou abaissée par un tremblement de terre et alors ce qui restera sera trouvé montueux. » Cette opinion est d’autant plus remarquable que, bien longtemps après Bernard Palissy, on voit des auteurs expliquer les fossiles des pays montagneux en supposant que la mer a été jadis plus profonde de toute la hauteur des sommets.

L’efficacité de la cause des tremblemens de terre étant reconnue pour l’édification des chaînes de montagnes, on est invité à rechercher dans les caractères de celles-ci des traits qui jetteront du jour sur l’allure orogénique des séismes. Par conséquent, la disposition très inclinée sur l’horizon des grandes géoclases doit être prise en très haute considération. En comparant les diverses chaînes européennes, on reconnaît que l’effort d’où elles résultent a constamment été dirigé au Nord-Ouest, et on se représente la surface de cette partie du monde alimentant, depuis l’aurore des temps sédimentaires, une succession de vagues rocheuses poussées les unes derrière les autres vers un centre boréal commun, qu’on peut appeler le pôle orogénique.

Le colossal travail s’est accompli sans doute d’une façon continue et cependant il a donné lieu à des effets intermittens, chaque chaîne étant séparée des chaînes plus anciennes et par conséquent plus septentrionales qu’elle, par un pays relativement, plat, qui la précède et que Suess désignait pour cette raison sous le nom de Vorland.

Quant à la cause de la poussée vers le Nord, aussi manifeste en Amérique que dans le vieux monde, elle paraît elle-même