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prétentions de l’Angleterre, soit pour elle-même, soit pour l’Egypte ?… Il était indispensable que l’évacuation de Fachoda, si elle devait avoir lieu, ce que je ne me refusais pas absolument à admettre par hypothèse, fût précédée d’une entente sur son mode d’exécution et sur ses conséquences ; en d’autres termes, il fallait en venir à une délimitation amiable. »

Cette interprétation de la phrase un peu ambiguë insérée, par lord Salisbury, dans son télégramme du 9 septembre était ce qu’il y avait de plus raisonnable. M. de Courcel posait immédiatement les bases de la discussion s’il était encore temps de l’engager : « Nous ne pouvions admettre que nos provinces de l’intérieur de l’Afrique fussent seules exclues d’un débouché sur le Nil quand d’autres puissances se trouvaient, avec l’assentiment formel de l’Angleterre, posséder des territoires étendus riverains du fleuve. Qui sait si, à la suite d’un accord réglant la difficulté présente, le long malentendu créé entre la France et l’Angleterre ne se trouverait pas implicitement dissipé, au grand avantage des deux pays ? »

En s’exprimant ainsi, M. le baron de Courcel, avec sa haute expérience, sa connaissance entière du passé de cette affaire et des affaires en général, s’inspirait exactement et sincèrement de la politique suivie par le quai d’Orsay depuis quatre ans. En effet, si le présent exposé a rempli son but, il est démontré, maintenant, que ce n’était pas le conflit que l’on cherchait à Paris, mais l’accord ; les précédons,, la marche progressive et laborieuse de cette longue « négociation africaine » prouvent qu’en 1898 comme en 1894, on espérait arriver à une liquidation honorable, pour les deux parties, du long malentendu créé entre la France et l’Angleterre.

Un débat engagé quelques mois plus tôt, sous l’impression immédiate de la Convention de juin 1898, eût sans doute obtenu ce résultat. En tous cas, avant la victoire de sir Herbert Kitchener et avant la rencontre des deux troupes, il eût diminué la force de l’argument de fait et atténué le dangereux dilemme du recul imposé à l’une ou à l’autre puissance. Les deux chefs eussent trouvé à Fachoda, non pas une situation inextricable, mais des instructions concertées.

A un point de vue plus élevé, la France et l’Angleterre eussent organisé leurs rapports, non seulement dans le haut Nil mais en Egypte, au lieu de les laisser dans l’état obscur et