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LA JEUNESSE
D'EUGÈNE FROMENTIN

M. Pierre Blanchon, qui a déjà tant fait, pieusement, pour ajouter quelque chose à la pure gloire d’Eugène Fromentin, publie aujourd’hui, avec préface et commentaire perpétuel, les Lettres de jeunesse d’Eugène Fromentin[1], et cette publication est une des plus attachantes que je sache. Elle complète très heureusement les Lettres de voyage en Belgique et en Hollande que la Revue publiait en juillet dernier.

La formation de l’esprit et de l’âme de Fromentin, voilà ce que nous voyons presque sans ombre, voilà ce que nous pouvons presque toucher du doigt, dans ces lettres qui vont de 1840 à 1848, c’est-à-dire de la vingtième année de Fromentin à sa vingt-huitième.

Je dis de son esprit et de son âme ; car l’un et l’autre se développèrent, non point parallèlement, mais bien conjointement, intimement unis l’un à l’autre. Il ne se trompe pas quand il dit dans une de ses lettres : « Quelqu’un, — Chateaubriand, je crois, — dit en des termes éloquens et concis, que j’oublie, qu’il n’y a pas d’équilibre possible entre le cœur et l’esprit et qu’ils se développent communément en raison inverse l’un de l’autre. Il y a dans cette opinion, que j’avais jadis acceptée sans examen, sinon une erreur complète, du moins une méprise singulière, qui vient de ce qu’on sépare à tort le domaine du cœur de celui de l’esprit : les mouvemens de l’un et de l’autre se confondent.

  1. Un vol. in-16 ; Plon. Voyez aussi la Revue du 1er octobre 1905.