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il se mettrait à des toutes les influences électorales du département. Et les indigènes ne résistent jamais à l’administrateur ; ils finissent toujours par lui dire : « Tu es notre maître. Que cela soit, puisque tu le veux ! »

Les indigènes sont en réalité dans un état de vassalité vis-à-vis des colons, et ce sont ces derniers qui disposent de leurs intérêts. Aussi, quel nid d’abus ! On voit, par ce système, quelques colons avoir pouvoir quelquefois sur trente ou quarante mille indigènes, car la commune mixte est toujours très étendue ; les plus petites dépassent encore la superficie d’un de nos cantons ; il y en a qui sont presque aussi grandes qu’un département. Et ce pouvoir dégénère en tyrannie de deux façons. En premier lieu, par la façon dont les impôts communaux sont employés ; encore ici les indigènes en payent la plus grande partie et reçoivent très peu de services en échange : les prestations leur deviennent ainsi particulièrement odieuses, car souvent on les envoie à plusieurs journées de chez eux pour faire des routes aux villages européens. En second lieu, par la façon dont on crée des revenus à la commune. Non seulement les villages que l’on crée sur son territoire sont établis sur des terres prises d’une manière ou de l’autre aux indigènes, mais le conseil de la commune trouve encore le moyen de leur disputer le reste. Les terres qu’ils conservent étant des terres indivises qui forment la propriété du douar, on assimile cette propriété à un communal, et le conseil s’arroge le droit d’en disposer à ce titre et de le mettre en location.

Le but vers lequel il nous paraît bon de tendre pour remédier, à ces inconvéniens est de chercher à donner à nos sujets musulmans la plus grande autonomie communale possible, à rendre moins étroite la tutelle des administrateurs et à les laisser maîtres de leur budget, bien entendu sous le contrôle de l’autorité préfectorale. Par exemple, les populations indigènes des communes de plein exercice pourraient participer d’une manière plus large à l’emploi des ressources budgétaires. Et y aurait-il un inconvénient tellement majeur à ce que les électeurs musulmans prissent part à l’élection des maires, ou tout au moins des adjoints ? Et si on ne veut pas pour le moment aller jusque-là, qu’est-ce qui empêcherait de détacher des communes de plein exercice, pour les faire rentrer dans le périmètre des communes mixtes, les douars arbitrairement annexés ?