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Malheureusement, peu de monumens d’architecture de cette époque ont survécu, mais les découvertes faites à Rome, celles des peintures de Santa Maria Antiqua ou du cimetière de Commodilla, sont venues montrer le rôle important de l’art hellénistique en Occident. . C’est à lui que les manuscrits carolingiens doivent leurs canons évangéliaires et ces belles initiales où, au milieu des enroulemens de feuillage, se joue toute la faune de l’Orient : l’évangéliaire de Godescalc composé pour Charlemagne a de nombreux rapports avec l’évangéliaire arménien d’Etschmiadzin. Enfin un témoignage curieux de Grégoire de Tours nous montre le motif de la Crucifixion, originaire de Syrie, s’introduisant à Narbonne, c’est-à-dire dans une ville qui comptait une importante colonie de Syriens.

Les communications directes entre l’art occidental et l’Orient paraissent donc un fait bien établi. A la faveur même de la stérilité qui suivit les invasions barbares, l’Orient et l’art oriental firent la conquête de l’Europe. Des études récentes ont même montré que cette action avait été encore plus étendue qu’on n’eût osé le supposer. L’Italie méridionale fut hellénisée par les moines orientaux qui fuyaient les invasions persanes et musulmanes. Les miniatures des manuscrits du Mont Cassin et de Grottaferrata reproduisent souvent des modèles orientaux. Les pays slaves eux-mêmes, la Serbie et la Russie, ne doivent pas toute leur culture à Constantinople et, dans les miniatures d’un psautier serbe du XVe siècle, M. Strzygowski a vu la copie à peine déformée d’un manuscrit syriaque du Ve siècle. Les monastères du Mont-Athos paraissent avoir été, indépendamment de Constantinople, un centre où les traditions de l’art oriental se conservèrent intactes pour se propager de là dans les pays slaves. Toutes les études et les découvertes de ces dernières années conduisent donc à la même conclusion et montrent l’action extraordinaire exercée par les écoles artistiques qui se formèrent à la fin de l’antiquité d’un mélange de l’hellénisme avec les techniques orientales,


VI

Comment donc, si la source fut commune à tous, expliquer la diversité des écoles provinciales qui ont régné au moyen âge ? Comment l’art hellénistique a-t-il pu produire des œuvres