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De là, le goût déjà ancien des Hongrois pour le français et pour la France. Entre eux et nous, il y a eu, du moyen âge et de leurs rois angevins aux Rakoczi, des relations d’amitié que leurs historiens se plaisent à rappeler. S’il est vrai que, depuis le XVIIIe siècle, notre littérature a partout contribué au réveil des peuples, cela l’est particulièrement de la Hongrie, du patriotisme magyar, de la civilisation hongroise. Entre cette dernière et la culture française, il y a, semble-t-il, plus d’affinités, parlant plus de sympathies, qu’entre elle et l’orgueilleuse et parfois pédantesque culture germanique. Aussi, ne faut-il pas s’étonner de la faveur que retrouvent, aux bords du Danube et de la Tisza, notre langue, notre art, notre littérature. Entre la Hongrie et nous recommencent à se nouer des liens qui ne peuvent, inquiéter personne, et qu’il ne dépend que de nous de rendre plus étroits.

Grâce à l’activité de quelques-uns de nos compatriotes, grâce surtout à l’initiative et au tact de notre consul général à Budapest, les sympathies hongroises pour notre langue et notre littérature se sont affirmées, en ces derniers temps, de la façon la plus flatteuse pour nous. Sous l’impulsion de M. le vicomte de Fontenay, notre consul général, il s’est fondé, à Budapest, une « Société littéraire française » qui compte parmi ses adhérens les plus grands noms de la Hongrie et les plus illustres représentans de la nation. Cette société ne se contente pas d’ouvrir des cours gratuits de français, de distribuer des bourses d’études aux Hongrois désireux de suivre à Paris les cours de « l’Alliance française, » d’appeler de France des écrivains ou des artistes à donner des conférences en Hongrie, elle a entrepris et fait réussir une œuvre plus difficile. Elle a fondé une Revue de Hongrie entièrement rédigée en français, qui a pour collaborateurs, des savans, des politiques, des littérateurs hongrois. Les ministres du royaume, les chefs du gouvernement et les chefs de partis, un Wekerlé, un Albert Apponyi, un Kossuth, un Andrassy, n’ont pas dédaigné d’y exposer eux-mêmes, en notre langue, les plus graves problèmes de la politique hongroise, la question des finances, celle des écoles, celle du commerce, celle de la réforme électorale. Les Hongrois se sont souvent plaints d’être mal connus et mal compris de la France et de l’Europe. Avec la Revue de Hongrie, ils ont aujourd’hui le moyen de parler eux-mêmes au grand public européen, de défendre, devant lui, leurs droits et leur politique. La place grandissante que la Hongrie est appelée