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portraits d’homme de M. Jacques Blanche (salle IV bis). On ne peut rien voir de plus habile, de plus audacieux, ni de plus expéditif. Cet étrange artiste, qui cherche sans cesse comme s’il n’avait encore rien trouvé, et, en plein succès, besogne comme s’il lui fallait réparer des défaites, simplifie chaque année sa facture, se rend maître de son métier chaque année davantage et signifie de plus en plus de choses avec de moins en moins de touches ou de traits. Ce qu’il appelle, ici, Esquisse (no 108), est une sorte de chef-d’œuvre accompli.

Non loin de là, sont les toiles de M. Lepére dont deux surtout : l’Orage qui monte (no 744) et A la fontaine (no 747), paraissent les plus vigoureuses études d’automne qu’il nous ait été donné de voir depuis longtemps. On s’arrêtera aussi (salle IV) devant les figures du merveilleux coloriste qu’est M. Garrido, Retour de la pêche et Hareng frais, puis (salle III) devant les enfans à table au bord de l’Océan, intitulés la Collation par M. Lucien Simon, et, salle II, aux paysages de M. Braquaval.

M. Braquaval est bien de son pays, de ces Flandres où les mornes étendues de terres plates et grises n’attirent le regard par aucun spectacle, mais où, en compensation, les troupeaux de nuages, animent mieux le ciel. Rarement on est parvenu, comme lui, à les dénombrer, à les mettre en perspective, à les échelonner jusqu’au fond de l’horizon. C’est, là, de cette peinture « concave » que Fromentin note comme caractéristique des Hollandais. On peut regarder indéfiniment les nuages nombreux et profus de M. Braquaval : on y trouve toujours quelque chose à découvrir. Ces toiles rares et précieuses resteront comme le témoignage qu’au XXe siècle, il y a eu quelqu’un qui regardait le ciel.

Celles de M. Bail, aux Champs-Elysées (salle 17) et de M. Maxence (salle 28) témoignent que l’un a étudié la lumière comme Terburg et que l’autre réalise dans le dessin des mains (l’Angélus no 1257) les minutieux prodiges de Mabuse en son Carondelet ; tandis que la facture large est représentée par M. Bonnat en son Portrait du général Florentin.

Enfin, à notre époque où la « composition » est proscrite par les dogmes modernistes, c’est une manière de scandale que la présence, aux Champs-Elysées, de deux tableaux admirablement ordonnés, où les figures paraissent associées et mues par un sentiment collectif : les Noces d’or de M. Déchenaud (salle 26) et la Sœur Rosalie de M. de Richemont (salle 3). Dans une rue étroite,