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CONSPIRATEURS ET GENS DE POLICE[1]

QUATRIÈME PARTIE
L’AVENTURE DU COLONEL FOURNIER ET LA MYSTÉRIEUSE AFFAIRE DONNADIEU


I. — LA LETTRE SCELLÉE DE ROUGE

La printanière et radieuse journée du 13 floréal s’était, pour Donnadieu, terminée de bien déplaisante façon.

Jamais cependant Julie Basset, « Petite Julie, » sa capricieuse maîtresse, ne s’était montrée plus rieuse, ni plus sémillante. Si mauvaise, le matin, et si menaçante à l’annonce de la séparation, la pauvrette paraissait maintenant résignée. Elle comprenait… Non, un trottin comme elle, simple ouvrière, fille de portier, ne pouvait devenir Madame la commandante, l’épouse d’un citoyen chef d’escadron ! Et Donnadieu s’émerveillait de voir chez une humble grisette une telle intelligence des choses de la vie… Après le départ de La Chevardière, leur promenade aux Tuileries se continua, plus amoureuse encore. Souriant, minaudant, babillant, de son bras enlaçant le bras de ce cher Gabriel, sous les œillades des mirliflores ou les lorgnons des merveilleuses, Petite Julie semblait tout à l’ivresse de vivre une dernière journée de bonheur. Du reste, pas un mot de son colloque avec l’homme à

  1. Voyez la Revue des 1er avril, 1er mai, 1er juin 1908.